Last year, I went on my first book tour. In 13 months, I flew to 14 countries and gave some hundred talks. Every talk in every country began with an introduction, and every introduction began, alas, with a lie: "Taiye Selasi comes from Ghana and Nigeria," or "Taiye Selasi comes from England and the States." Whenever I heard this opening sentence, no matter the country that concluded it -- England, America, Ghana, Nigeria -- I thought, "But that's not true." Yes, I was born in England and grew up in the United States. My mum, born in England, and raised in Nigeria, currently lives in Ghana. My father was born in Gold Coast, a British colony, raised in Ghana, and has lived for over 30 years in the Kingdom of Saudi Arabia. For this reason, my introducers also called me "multinational." "But Nike is multinational," I thought, "I'm a human being."
L'année dernière, j'ai fait ma première tournée de promotion de mon livre. En 13 mois, je suis allée dans 14 pays et j'ai donné une centaine de conférences. Chaque conférence dans chaque pays commençait par une introduction, et chaque introduction commençait, hélas, avec un mensonge : « Taiye Selasi vient du Ghana et du Nigeria » ou « Taiye Selasi vient d'Angleterre et des États-Unis ». Dès que j'entendais cette phrase d'introduction, quel que soit le pays qui l'achevait -- Angleterre, Amérique, Ghana, Nigeria -- je pensais : « Mais ce n'est pas vrai. » Oui, je suis née en Angleterre et j'ai grandi aux États-Unis. Ma mère, née en Angleterre et élevée au Nigeria, vit actuellement au Ghana. Mon père est né sur la Côte d'Or, une colonie anglaise, a été élevé au Ghana, et a vécu plus de 30 ans en Arabie Saoudite. A cause de cela, mes introducteurs m'appelaient aussi « multinationale ». « Mais Nike est multinational, pensai-je, je suis un être humain. »
Then, one fine day, mid-tour, I went to Louisiana, a museum in Denmark where I shared the stage with the writer Colum McCann. We were discussing the role of locality in writing, when suddenly it hit me. I'm not multinational. I'm not a national at all. How could I come from a nation? How can a human being come from a concept? It's a question that had been bothering me for going on two decades. From newspapers, textbooks, conversations, I had learned to speak of countries as if they were eternal, singular, naturally occurring things, but I wondered: to say that I came from a country suggested that the country was an absolute, some fixed point in place in time, a constant thing, but was it? In my lifetime, countries had disappeared -- Czechoslovakia; appeared -- Timor-Leste; failed -- Somalia. My parents came from countries that didn't exist when they were born. To me, a country -- this thing that could be born, die, expand, contract -- hardly seemed the basis for understanding a human being.
Puis un jour, au milieu de la tournée, je suis allée à Louisiana, un musée au Danemark, où j'ai partagé la scène avec l'écrivain Colum McCann. Nous parlions du rôle de la localité dans l'écriture, quand soudain cela m'a frappée. Je ne suis pas multinationale. Je ne suis pas du tout nationale. Comment pourrais-je venir d'une nation ? Comment est-ce qu'un être humain peut venir d'un concept ? C'est une question qui me dérange depuis deux décennies. Des journaux, des livres scolaires, des conversations, j'avais appris à parler des pays comme s'ils étaient des choses éternelles, singulières et naturelles mais je me demandais : dire que je venais d'un pays suggérait que le pays soit un absolu, un point fixé dans le temps et l'espace, une chose constante, mais l'était-ce ? Au cours de mon existence, des pays avaient disparu : la Tchécoslovaquie ; étaient apparus : le Timor-Leste ; avaient échoué : la Somalie. Mes parents venaient de pays qui n'existaient pas quand ils sont nés. Pour moi, un pays -- cette chose qui pouvait naître, mourir, grandir, rétrécir -- semblait difficilement être la base de la compréhension d'un être humain.
And so it came as a huge relief to discover the sovereign state. What we call countries are actually various expressions of sovereign statehood, an idea that came into fashion only 400 years ago. When I learned this, beginning my masters degree in international relations, I felt a sort of surge of relief. It was as I had suspected. History was real, cultures were real, but countries were invented. For the next 10 years, I sought to re- or un-define myself, my world, my work, my experience, beyond the logic of the state.
Et la découverte de l'état souverain était un énorme soulagement. Le mot pays exprime en fait des expressions diverses d'un état souverain, une idée qui a été mise à la mode il y a seulement 400 ans. Quand j'ai appris cela, au début de mon master en relations internationales, j'ai ressenti une vague de soulagement. C'était ce que j'avais suspecté. L'histoire était réelle, les cultures étaient réelles, mais les pays étaient inventés. Pendant les 10 années suivantes, j'ai cherché à me redéfinir ou à me dé-définir, mon monde, mon travail, mon expérience, au-delà de la logique de l’État.
In 2005, I wrote an essay, "What is an Afropolitan," sketching out an identity that privileged culture over country. It was thrilling how many people could relate to my experience, and instructional how many others didn't buy my sense of self. "How can Selasi claim to come from Ghana," one such critic asked, "when she's never known the indignities of traveling abroad on a Ghanian passport?"
En 2005, j'ai rédigé un essai : « Qu'est-ce qu'un Afropolitain ? », esquissant une identité qui privilégiait la culture face au pays. C'était excitant de voir combien de personnes pouvaient s'identifier à mon expérience, et instructif de voir combien d'autres rejetaient mon idée de moi-même. « Comment Selasi peut-elle prétendre venir du Ghana, demandait une critique, alors qu'elle n'a jamais connu les indignités de voyager à l'étranger avec un passeport ghanéen ? »
Now, if I'm honest, I knew just what she meant. I've got a friend named Layla who was born and raised in Ghana. Her parents are third-generation Ghanians of Lebanese descent. Layla, who speaks fluent Twi, knows Accra like the back of her hand, but when we first met years ago, I thought, "She's not from Ghana." In my mind, she came from Lebanon, despite the patent fact that all her formative experience took place in suburban Accra. I, like my critics, was imagining some Ghana where all Ghanaians had brown skin or none held U.K. passports. I'd fallen into the limiting trap that the language of coming from countries sets -- the privileging of a fiction, the singular country, over reality: human experience. Speaking with Colum McCann that day, the penny finally dropped. "All experience is local," he said. "All identity is experience," I thought. "I'm not a national," I proclaimed onstage. "I'm a local. I'm multi-local."
Pour être honnête, je savais de quoi elle parlait. J'ai une amie du nom de Layla qui est née et a grandi au Ghana. Ses parents sont la troisième génération de Ghanéens de descendance libanaise. Layla, qui parle couramment Twi, connaît Accra par cœur, mais quand nous nous sommes rencontrées il y a quelques années, j'ai pensé : « Elle ne vient pas du Ghana. » Pour moi, elle venait du Liban, malgré le fait que tout son expérience formatrice ait eu lieu dans la banlieue d'Accra. Comme mes critiques, j'imaginais un Ghana où tous les Ghanéens avaient la peau marron et personne n'avait de passeport britannique. J'étais tombée dans le piège restrictif qu'impose le langage lié au fait de venir d'un pays -- le privilège d'une fiction, un pays unique, face à la réalité : l'expérience humaine. En parlant avec Colum McCann ce jour-là, l'évidence m'est finalement apparue. « Toute expérience est locale », disait-il. « Toute identité est expérience », pensais-je. « Je ne suis pas une nationale », proclamai-je sur scène. « Je suis une locale. Je suis une multi-locale. »
See, "Taiye Selasi comes from the United States," isn't the truth. I have no relationship with the United States, all 50 of them, not really. My relationship is with Brookline, the town where I grew up; with New York City, where I started work; with Lawrenceville, where I spend Thanksgiving. What makes America home for me is not my passport or accent, but these very particular experiences and the places they occur. Despite my pride in Ewe culture, the Black Stars, and my love of Ghanaian food, I've never had a relationship with the Republic of Ghana, writ large. My relationship is with Accra, where my mother lives, where I go each year, with the little garden in Dzorwulu where my father and I talk for hours. These are the places that shape my experience. My experience is where I'm from.
Vous savez, « Taiye Selasi vient des États-Unis » n'est pas la vérité. Je n'ai pas de relation avec les États-Unis, aucun des 50 États, pas vraiment. Ma relation est avec Brookline, la ville où j'ai grandi ; avec New York, où j'ai commencé à travailler ; avec Lawrenceville, où j'ai passé Thanksgiving. Ce qui fait de l'Amérique ma maison n'est ni mon passeport ni mon accent, mais ces expériences très particulières et les endroits où elles se sont déroulées. Malgré ma fierté envers la culture Ewe, les Black Stars, et mon amour pour la nourriture ghanéenne, je n'ai jamais eu de relation avec la République de Ghana en intégralité. Ma relation est avec Accra, où ma mère vit, où je vais chaque année, avec le petit jardin à Dzorwulu où mon père et moi parlons durant des heures. Ce sont les lieux qui façonnent mon expérience. Je viens de mon expérience.
What if we asked, instead of "Where are you from?" -- "Where are you a local?" This would tell us so much more about who and how similar we are. Tell me you're from France, and I see what, a set of clichés? Adichie's dangerous single story, the myth of the nation of France? Tell me you're a local of Fez and Paris, better yet, Goutte d'Or, and I see a set of experiences. Our experience is where we're from.
Et si, au lieu de demander : « D'où venez-vous ? » nous demandions : « Où êtes-vous un local ? » Cela nous en dirait tellement plus sur qui vous êtes et nos points communs. Dites-moi que vous venez de France, et je vois quoi, un jeu de clichés ? La dangereuse histoire unique d'Adichie, le mythe de la nation de France ? Dites-moi que vous êtes un local de Fez et de Paris, ou mieux encore, de la Goutte d'Or, et je vois un jeu d'expériences. Nous venons de notre expérience.
So, where are you a local? I propose a three-step test. I call these the three "R’s": rituals, relationships, restrictions.
Donc où êtes-vous un local ? Je propose un test en trois étapes. Je les appelle les trois R : Rituels, Relations, Restrictions.
First, think of your daily rituals, whatever they may be: making your coffee, driving to work, harvesting your crops, saying your prayers. What kind of rituals are these? Where do they occur? In what city or cities in the world do shopkeepers know your face? As a child, I carried out fairly standard suburban rituals in Boston, with adjustments made for the rituals my mother brought from London and Lagos. We took off our shoes in the house, we were unfailingly polite with our elders, we ate slow-cooked, spicy food. In snowy North America, ours were rituals of the global South. The first time I went to Delhi or to southern parts of Italy, I was shocked by how at home I felt. The rituals were familiar. "R" number one, rituals.
Tout d'abord, pensez à vos rituels quotidiens, quels qu'ils soient : préparer son café, aller au travail, faire la moisson, dire ses prières. Quel genre de rituels sont-ils ? Où ont-ils lieu ? Dans cette ou ces ville(s) dans le monde, les marchands vous connaissent-ils ? Enfant, je réalisais des rituels de banlieue plutôt standard à Boston, faisant quelques ajustements par rapport aux rituels que ma mère avait ramenés de Londres et du Lagos. Dans la maison, nous enlevions nos chaussures, nous étions toujours polis envers nos aînés, nous mangions des plats mijotés épicés. Dans l'Amérique du nord enneigée, nos rituels étaient ceux des pays du sud. La première fois que je suis allée à Delhi ou dans le sud de l'Italie, j'étais choquée par mon impression d'être à la maison. Ces rituels étaient familiers. Le premier R : Rituels.
Now, think of your relationships, of the people who shape your days. To whom do you speak at least once a week, be it face to face or on FaceTime? Be reasonable in your assessment; I'm not talking about your Facebook friends. I'm speaking of the people who shape your weekly emotional experience. My mother in Accra, my twin sister in Boston, my best friends in New York: these relationships are home for me. "R" number two, relationships.
Pensez à vos relations, aux gens qui façonnent vos journées. A qui parlez-vous au moins une fois par semaine, que ce soit face à face ou sur FaceTime ? Soyez raisonnables dans votre estimation ; je ne parle pas de vos amis sur Facebook. Je parle des gens qui façonnent votre expérience émotionnelle de la semaine. Ma mère à Accra, ma sœur jumelle à Boston, mes meilleurs amis à New York : ces relations sont ma maison. Le deuxième R : Relations.
We're local where we carry out our rituals and relationships, but how we experience our locality depends in part on our restrictions. By restrictions, I mean, where are you able to live? What passport do you hold? Are you restricted by, say, racism, from feeling fully at home where you live? By civil war, dysfunctional governance, economic inflation, from living in the locality where you had your rituals as a child? This is the least sexy of the R’s, less lyric than rituals and relationships, but the question takes us past "Where are you now?" to "Why aren't you there, and why?" Rituals, relationships, restrictions.
Nous sommes des locaux où nous avons nos rituels et nos relations, mais la manière dont nous expérimentons notre localité dépend en partie de nos restrictions. Par restrictions je veux dire : où êtes-vous capable de vivre ? Quel passeport possédez-vous ? Êtes-vous restreint par, disons, le racisme, par l'impression d'être totalement à la maison où vous vivez ? Par la guerre civile, un gouvernement dysfonctionnel, l'inflation économique, par le fait de vivre dans une localité où, enfant, vous aviez vos rituels ? C'est le R le moins sexy, moins lyrique que les rituels et les relations, mais la question nous emmène de : « Où êtes-vous actuellement ? » à : « Pourquoi n'êtes-vous pas là-bas ? » Les rituels, les relations, les restrictions.
Take a piece of paper and put those three words on top of three columns, then try to fill those columns as honestly as you can. A very different picture of your life in local context, of your identity as a set of experiences, may emerge.
Prenez une feuille de papier et mettez ces trois mots en haut de trois colonnes, puis essayez de remplir ces colonnes aussi honnêtement que possible. Une image très différente de votre vie dans un contexte local, de votre identité en tant que jeu d'expériences pourrait émerger.
So let's try it. I have a friend named Olu. He's 35 years old. His parents, born in Nigeria, came to Germany on scholarships. Olu was born in Nuremberg and lived there until age 10. When his family moved to Lagos, he studied in London, then came to Berlin. He loves going to Nigeria -- the weather, the food, the friends -- but hates the political corruption there. Where is Olu from?
Alors essayons. J'ai un ami du nom de Olu. Il a 35 ans. Ses parents, nés au Nigeria, sont venus en Allemagne grâce à des bourses d'études. Olu est né à Nuremberg et y a vécu jusqu'à ses 10 ans. Quand sa famille a déménagé au Lagos, il a étudié à Londres, puis est venu à Berlin. Il adore aller au Nigeria -- la météo, la nourriture, les amis -- mais déteste la corruption politique là-bas. D'où vient Olu ?
I have another friend named Udo. He's also 35 years old. Udo was born in Córdoba, in northwest Argentina, where his grandparents migrated from Germany, what is now Poland, after the war. Udo studied in Buenos Aires, and nine years ago came to Berlin. He loves going to Argentina -- the weather, the food, the friends -- but hates the economic corruption there. Where is Udo from? With his blonde hair and blue eyes, Udo could pass for German, but holds an Argentinian passport, so needs a visa to live in Berlin. That Udo is from Argentina has largely to do with history. That he's a local of Buenos Aires and Berlin, that has to do with life.
J'ai un autre ami du nom d'Udo. Il a aussi 35 ans. Udo est né à Cordoba, au nord-ouest de l'Argentine, où ses grands-parents ont migré depuis l'Allemagne, qui est aujourd'hui Pologne, après la guerre. Udo a étudié à Buenos Aires, et il y a 9 ans est venu à Berlin. Il adore aller en Argentine -- la météo, la nourriture, les amis -- mais déteste la corruption économique là-bas. D'où vient Udo ? Avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus, Udo pourrait être Allemand, mais il détient un passeport argentin et a besoin d'un visa pour vivre à Berlin. Le fait qu'Udo vienne d'Argentine a beaucoup à voir avec l'histoire. Qu'il soit un local de Buenos Aires et de Berlin, cela a à voir avec sa vie.
Olu, who looks Nigerian, needs a visa to visit Nigeria. He speaks Yoruba with an English accent, and English with a German one. To claim that he's "not really Nigerian," though, denies his experience in Lagos, the rituals he practiced growing up, his relationship with family and friends.
Olu, qui semble être Nigérian, a besoin d'un visa pour aller au Nigeria. Il parle Yoruba avec un accent anglais et anglais avec un accent allemand. Cependant, prétendre qu'il « n'est pas vraiment nigérian » revient à nier son expérience à Lagos, les rituels qu'il a pratiqués en grandissant, sa relation avec sa famille et ses amis.
Meanwhile, though Lagos is undoubtedly one of his homes, Olu always feels restricted there, not least by the fact that he's gay.
Pendant ce temps, bien que le Lagos soit indubitablement une de ses maisons, Olu s'y sent restreint, ne serait-ce qu'en raison de son homosexualité.
Both he and Udo are restricted by the political conditions of their parents' countries, from living where some of their most meaningful rituals and relationships occur. To say Olu is from Nigeria and Udo is from Argentina distracts from their common experience. Their rituals, their relationships, and their restrictions are the same.
Lui et Udo sont tous deux restreints par les conditions politiques des pays de leurs parents, les empêchant de vivre où certains de leurs rituels et leurs relations les plus significatifs ont lieu. Dire qu'Olu vient du Nigeria et Udo d'Argentine les détourne de leur expérience commune. Leurs rituels, leurs relations et leurs restrictions sont les mêmes.
Of course, when we ask, "Where are you from?" we're using a kind of shorthand. It's quicker to say "Nigeria" than "Lagos and Berlin," and as with Google Maps, we can always zoom in closer, from country to city to neighborhood. But that's not quite the point. The difference between "Where are you from?" and "Where are you a local?" isn't the specificity of the answer; it's the intention of the question. Replacing the language of nationality with the language of locality asks us to shift our focus to where real life occurs. Even that most glorious expression of countryhood, the World Cup, gives us national teams comprised mostly of multilocal players. As a unit of measurement for human experience, the country doesn't quite work. That's why Olu says, "I'm German, but my parents come from Nigeria." The "but" in that sentence belies the inflexibility of the units, one fixed and fictional entity bumping up against another. "I'm a local of Lagos and Berlin," suggests overlapping experiences, layers that merge together, that can't be denied or removed. You can take away my passport, but you can't take away my experience. That I carry within me. Where I'm from comes wherever I go.
Bien sûr, quand nous demandons : « D'où venez-vous ? » nous utilisons un raccourci. Il est plus rapide de répondre « Nigeria » que « Lagos et Berlin », et, comme avec Google Maps, nous pouvons toujours zoomer, d'un pays à une ville à un quartier. Mais la question n'est pas là. La différence entre : « D'où venez-vous ? » et « Où êtes-vous un local ? » n'est pas la spécificité de la réponse ; c'est l'intention de la question. Remplacer le langage de la nationalité avec celui de la localité nous demande de tourner notre concentration vers où la vie a vraiment lieu. Même cette expression la plus glorieuse d'appartenance à un pays, la Coupe du Monde, nous offre des équipes nationales composées majoritairement de joueurs multi-locaux. En tant qu'unité de mesure de l'expérience humaine, le pays ne fait pas l'affaire. C'est pourquoi Olu dit : « Je suis Allemand mais mes parents viennent du Nigeria. » Le « mais » dans cette phrase dément l'inflexibilité des unités, une entité fixée et fictive se cognant à une autre. « Je suis un local du Lagos et de Berlin » suggère un chevauchement d'expériences, des couches qui fusionnent, cela ne peut être nié ou retiré. Vous pouvez m'enlever mon passeport, mais vous ne pouvez m'enlever mon expérience. Que je détiens en moi. D'où je viens où que j'aille.
To be clear, I'm not suggesting that we do away with countries. There's much to be said for national history, more for the sovereign state. Culture exists in community, and community exists in context. Geography, tradition, collective memory: these things are important. What I'm questioning is primacy. All of those introductions on tour began with reference to nation, as if knowing what country I came from would tell my audience who I was. What are we really seeking, though, when we ask where someone comes from? And what are we really seeing when we hear an answer?
Pour être claire, je ne suggère pas que nous abandonnions les pays. Il y a beaucoup à dire de l'histoire nationale, plus encore sur l'état souverain. La culture existe dans une communauté, et la communauté existe dans un contexte. La géographie, la tradition, la mémoire collective, ce sont des choses importantes. Ce que je questionne, c'est la primauté. Toutes ces introductions en tournée commençaient par une référence à la nation, comme si savoir de quel pays je venais disait à mon public qui j'étais. Que cherchons-nous vraiment, cependant, en demandant d'où vient quelqu'un ? Et que voyons-nous vraiment quand nous entendons la réponse ?
Here's one possibility: basically, countries represent power. "Where are you from?" Mexico. Poland. Bangladesh. Less power. America. Germany. Japan. More power. China. Russia. Ambiguous.
Voici une possibilité : les pays représentent le pouvoir. « D'où venez-vous ? » Mexique. Pologne. Bangladesh. Moins de pouvoir. Amérique. Allemagne. Japon. Plus de pouvoir. Chine. Russie. Ambigu.
(Laughter)
(Rires)
It's possible that without realizing it, we're playing a power game, especially in the context of multi-ethnic countries. As any recent immigrant knows, the question "Where are you from?" or "Where are you really from?" is often code for "Why are you here?"
Il est possible que sans le réaliser, nous jouions un jeu de pouvoir, particulièrement dans le contexte de pays multi-ethniques. Comme tout immigrant récent le sait, la question « D'où venez-vous ? » ou « D'où venez-vous vraiment ? » est souvent un code pour « Pourquoi êtes-vous ici ? »
Then we have the scholar William Deresiewicz's writing of elite American colleges. "Students think that their environment is diverse if one comes from Missouri and another from Pakistan -- never mind that all of their parents are doctors or bankers."
Puis nous avons les écrits savants de William Deresiewicz sur les universités américaines. « Les étudiants pensent que leur environnement est diversifié si un vient du Missouri et un autre du Pakistan -- peu importe que tous leurs parents soient docteurs ou banquiers. »
I'm with him. To call one student American, another Pakistani, then triumphantly claim student body diversity ignores the fact that these students are locals of the same milieu. The same holds true on the other end of the economic spectrum. A Mexican gardener in Los Angeles and a Nepali housekeeper in Delhi have more in common in terms of rituals and restrictions than nationality implies.
Je suis d'accord avec lui. Dire qu'un étudiant est Américain, un autre Pakistanais, puis prétendre triomphalement à la diversité du corps étudiant ignore le fait que ces étudiants sont des locaux du même milieu. La vérité est la même à l'autre extrême du spectre économique. Un jardinier mexicain à Los Angeles et une bonne népalaise à Delhi ont plus en commun en terme de rituels et de restrictions que ce que la nationalité implique.
Perhaps my biggest problem with coming from countries is the myth of going back to them. I'm often asked if I plan to "go back" to Ghana. I go to Accra every year, but I can't "go back" to Ghana. It's not because I wasn't born there. My father can't go back, either. The country in which he was born, that country no longer exists. We can never go back to a place and find it exactly where we left it. Something, somewhere will always have changed, most of all, ourselves. People.
Peut-être que mon plus gros problème avec le fait de venir d'un pays est le mythe d'y retourner. On me demande souvent si je prévoie de « retourner » au Ghana. Je vais à Accra chaque année mais je ne peux pas « retourner » au Ghana. Ce n'est pas parce que je n'y suis pas née. Mon père ne peut pas y retourner non plus. Le pays dans lequel il est né, ce pays n'existe plus. Nous ne pouvons pas retourner sur ce lieu et le trouver exactement où nous l'avons laissé. Quelque chose, quelque part aura toujours changé, particulièrement nous-mêmes. Les gens.
Finally, what we're talking about is human experience, this notoriously and gloriously disorderly affair. In creative writing, locality bespeaks humanity. The more we know about where a story is set, the more local color and texture, the more human the characters start to feel, the more relatable, not less. The myth of national identity and the vocabulary of coming from confuses us into placing ourselves into mutually exclusive categories. In fact, all of us are multi -- multi-local, multi-layered. To begin our conversations with an acknowledgement of this complexity brings us closer together, I think, not further apart. So the next time that I'm introduced, I'd love to hear the truth: "Taiye Selasi is a human being, like everybody here. She isn't a citizen of the world, but a citizen of worlds. She is a local of New York, Rome and Accra."
Finalement, nous parlons d'expérience humaine, cette affaire notoirement et glorieusement désordonnée. Dans l'écriture créative, la localité indique l'humanité. Plus nous en savons sur le lieu où se déroule une histoire, plus il y a de couleurs et de textures locales, plus les personnages semblent humains, tout du moins, plus nous pouvons nous identifier à eux. Le mythe de l'identité nationale et le vocabulaire de « venir de » nous induisent en erreur en nous plaçant dans des catégories qui s'excluent mutuellement. En fait, chacun d'entre nous est multi -- multi-local, multi-couches. Commencer notre conversation avec un reconnaissance de cette complexité nous rapproche, je pense, au lieu de nous éloigner. Donc la prochaine fois que je serai présentée, j'aimerais entendre la vérité : « Taiye Selasi est un être humain, comme tout le monde ici. Elle n'est pas citoyenne du monde, mais une citoyenne de mondes. Elle est une locale à New York, Rome et Accra. »
Thank you.
Merci.
(Applause)
(Applaudissements)