Cities are like siblings in a large polygamous family. Each one has a unique personality and is headed in a distinct direction. But they all have somewhat shared origins. Sometimes I think postcolonial cities are like the children of the two least-favorite wives, who are constantly being asked, "Ah, why can't you be more like your sister?"
Les villes sont comme des frères et sœurs d'une grande famille polygame. Chacune a une personnalité unique et va dans une direction différente. Mais elles partagent toutes leurs origines. Je pense que les villes post-coloniales sont comme les enfants des deux femmes les moins aimées, à qui l'on demande constamment : « Pourquoi n'es-tu pas plus comme ta sœur ? »
(Laughter)
(Rires)
The "why" of cities is largely the same, no matter where they are: an advantageous location that makes trade and administration possible; the potential for scalable opportunities for the skilled and unskilled alike; a popular willingness to be in constant flux and, of course, resilience. The "how" of cities, however, is a whole other story. How are they run? How do they grow? How do they decide who belongs and who doesn't?
Le « pourquoi » des villes est largement le même, peu importe où elles sont : un lieu avantageux qui rend possibles le commerce et l'administration ; le potentiel d'opportunités de tailles variables pour les personnes qualifiées ou non ; une volonté populaire d'être dans un flux constant et, bien sûr, de la résilience. Mais le « comment » des villes, c'est une tout autre histoire. Comment sont-elles dirigées ? Comment grandissent-elles ? Comment décident-elles qui y appartient ou non ?
Lagos is my home. You can always find the Nigerians by following the noise and the dancing, right?
Lagos est ma maison. On peut trouver les Nigérians en suivant le bruit et la danse, n'est-ce pas ?
(Laughter)
(Rires)
Like any major city, that place is a lot of things, many of which are highly contradictory. Our public transportation doesn't quite work, so we have these privately owned bright yellow buses that regularly cause accidents. Luxury car showrooms line badly maintained and often flooded roads. Street evangelism is only slightly less ubiquitous than street harassment. Sex workers sometimes have two degrees, a bank job and a prominent role in church.
Comme toute grande ville, cet endroit est beaucoup de choses, la plupart étant hautement contradictoires. Nos transports publics ne fonctionnent pas bien, nous avons donc des bus jaunes privés qui causent souvent des accidents. Les salles d'exposition de voitures de luxe sont mal entretenues et les routes souvent inondées. L'évangélisation de rue est légèrement moins omniprésente que les agressions de rue. Les professionnels du sexe ont parfois deux diplômes, sont banquiers et ont un rôle ecclésial important.
(Laughter)
(Rires)
On any given day, there can be either a party or a burned body in the middle of a street.
N'importe quel jour, il peut y avoir soit une fête soit un corps brûlé au milieu de la rue.
There is so much that is possible in Lagos and so much that isn't, and very often the difference between possibility and impossibility is simply who you are, and if you're lucky enough, who you're connected to. Belonging in Lagos is a fluid concept determined by ethnic origin, sexual orientation, gender, but most visibly and often most violently, class.
Tant de choses sont possibles à Lagos et tant sont impossibles, souvent la différence entre la possibilité et l'impossibilité est simplement votre identité et, si vous êtes chanceux, vos connexions. Avoir sa place à Lagos est un concept fluide déterminé par l'origine ethnique, l'orientation sexuelle, le sexe, mais de façon plus visible et plus violente, la classe.
Before Nigeria became a country, fisherpeople from the inland creeks started to come down the Lagos lagoon and establish villages along the coast. About 60 years later, my grandfather, Oludotun Adekunle Kukoyi, also arrived in Lagos. Like me, he was an alumnus of the University of Ibadan, a young member of the educated elite in the independence era. Over time, he built an illustrious career as a land surveyor, mapping out now-bustling neighborhoods when they were just waist-high wild grass. He died when I was nine. And by that time, my family, like the families of those fisherpeople, knew Lagos as home.
Avant que le Nigeria ne devienne un pays, les pêcheurs des criques intérieures sont descendus sur le lagon de Lagos et ont établi des villages le long de la côte. Environ 60 ans plus tard, mon grand-père, Oludotun Adekunle Kukoyi, est également arrivé à Lagos. Comme moi, c'était un ancien de l'université d'Ibadan, un jeune membre de l'élite éduquée durant l'ère de l'indépendance. Avec le temps, il s'est taillé une carrière d'arpenteur-géomètre, cartographiant des quartiers grouillants alors qu'ils n'étaient que des champs d'herbe sauvage. Il est mort quand j'avais 9 ans. A cette époque-là, ma famille, comme les familles de ces pêcheurs, considérait Lagos comme chez elle.
Among the Yoruba, we have a saying, "Èkó gb’olè, ó gb’ọ̀lẹ," which can be translated to mean that Lagos will welcome anyone. But that saying is becoming less and less true. Many Lagosians, including the descendants of those fisherpeople who arrived generations before my grandfather, are now being pushed out to make room for an emergent city that has been described as "the new Dubai." You see, Lagos inspires big dreams, even in its leaders, and successive governments have declared aspirations towards a megacity where poverty does not exist. Unfortunately, instead of focusing on the eradication of poverty as you would expect, the strategy of choice focuses on eliminating the poor.
Chez les Yorubas, nous avons un dicton : « Èkó gb’olè, ó gb’ọ̀lẹ », qui peut être traduit pour dire que Lagos accueillera n'importe qui. Ce dicton devient de moins en moins vrai. Nombre de Lagotiens, y compris les descendants de ces pêcheurs, arrivés des générations avant mon grand-père, sont aujourd'hui poussés dehors pour faire place à une ville émergente décrite comme « le nouveau Dubaï ». Lagos suscite de grands rêves, même chez les dirigeants, et les gouvernements successifs ont eu des aspirations d'une mégalopole où la pauvreté n'existe pas. Malheureusement, au lieu de se concentrer sur l'éradication de la pauvreté, comme on s'y attendrait, la stratégie choisie se concentre sur l'élimination des pauvres.
Last October, the Governor announced plans to demolish every single waterfront settlement in Lagos. There are more than 40 of these indigenous communities all over the city, with over 300,000 people living in them. Otodo Gbame, a hundred-year-old fishing village with a population about three-quarters that of Monaco and similar potential for beachfront luxury --
En octobre dernier, le gouverneur a annoncé prévoir de démolir tous les peuplements côtiers de Lagos. Il y a plus de 40 communautés indigènes à travers la ville et plus de 300 000 personnes y vivent. Otodo Gbame, un village pêcheur centenaire avec une population d'environ trois quarts celle de Monaco et un potentiel de luxe de front de mer similaire --
(Laughter)
(Rires)
was one of the first to be targeted.
a été l'une des premières cibles.
I first heard of Otodo Gbame after the demolition started. When I visited in November 2016, I met Magdalene Aiyefoju. She is a now-homeless woman whose surname means, "the world is blind." Magdalene's son Basil was one of over 20 people who were shot, drowned or presumed dead in that land grab. Standing outside her shelter, I saw the two white-sand football fields where Basil used to play. Spread all around us were the ruins of schools, churches, a primary health center, shops, thousands of homes. Young children enthusiastically helped to put up shelters, and about 5,000 of the residents, with nowhere else to go, simply stayed put. And then in April, state security personnel came back. This time, they cleared the community out completely, with beatings, bullets and fire. As I speak, there are construction crews preparing Otodo Gbame's beaches for anyone who can afford a multi-million-dollar view. The new development is called "Periwinkle Estate."
J'ai entendu parler d'Otodo Gbame après le début de la démolition. Quand j'y suis allée en novembre 2016, j'ai rencontré Magdalene Aiyefoju. Elle est maintenant sans-abri et son nom signifie « le monde est aveugle ». Le fils de Magdalene, Basil, fait partie de la vingtaine de personnes qui ont été abattues, noyées ou ont été présumées mortes lors de l'expropriation des terres. Juste dehors son abri, j'ai vu deux terrains de foot de sable blanc où Basil jouait. Tout autour, il y avait les ruines d'écoles, d'églises, d'un centre de santé, de magasins, de milliers de maisons. De jeunes enfants aidaient avec enthousiasme à construire des abris et environ 5 000 des résidents, n'ayant nulle part où aller, sont restés sur place. Puis en avril, la sécurité d'État est revenue. Cette fois-ci, ils ont complètement dégagé la communauté, à l'aide de tabassages, de balles et de feu. A l'heure où je parle, des équipes de construction préparent les plages d'Otodo Gbame pour ceux qui peuvent se payer une vue à plusieurs millions de dollars. Le nouveau développement s'appelle « Domaine Periwindle ».
Forced evictions are incredibly violent and, of course, unconstitutional. And yet, they happen so often in so many of our cities, because the first thing we are taught to forget about poor people is that they are people. We believe that a home is a thing a person absolutely has a right to, unless the person is poor and the home is built a certain way in a certain neighborhood. But there is no single definition of the word "home." After all, what is a slum besides an organic response to acute housing deficits and income inequality? And what is a shanty if not a person making a home for themselves against all odds? Slums are an imperfect housing solution, but they are also prime examples of the innovation, adaptability and resilience at the foundation -- and the heart -- of every functional city. You don't need to be the new Dubai when you're already Lagos.
Les évictions forcées sont incroyablement violentes et, bien sûr, inconstitutionnelles. Pourtant, elles arrivent si souvent dans tant de villes car la première chose que nous apprenons à oublier à propos des pauvres, c'est que ce sont des êtres humains. Nous croyons qu'une personne a absolument le droit à une maison, sauf si elle est pauvre, la maison faite d'une certaine façon dans un certain quartier. Il n'y a pas de définition unique du mot « maison ». Après tout, qu'est-ce qu'un bidonville à part une réponse organique à un grave déficit de logements et une inégalité de revenus ? Qu'est-ce qu'une cabane à part une personne se créant une maison envers et contre tout ? Les bidonvilles sont des solutions de logement imparfaites mais aussi d'excellents exemples de l'innovation, l'adaptabilité et la résilience à la base -- et au cœur -- de toute ville fonctionnelle. Pas besoin d'être le nouveau Dubaï quand on est déjà Lagos.
(Applause)
(Applaudissements)
We have our own identity, our own rhythm, and as anyone who knows Lagos can tell you, poor Lagosians are very often the source of the city's character. Without its poor, Lagos would not be known for its music or its endless energy or even the fact that you can buy an ice cold drink or a puppy through your car window.
Nous avons notre propre identité, notre propre rythme, et comme quiconque connaissant Lagos vous le dira, les Lagotiens pauvres sont très souvent la source du caractère de la ville. Sans ses pauvres, Lagos ne serait pas connue pour sa musique ou son énergie inépuisable ou même le fait que l'on peut acheter une boisson froide ou un chiot à travers une fenêtre de voiture.
(Laughter)
(Rires)
The conditions that cause us to define certain neighborhoods as slums can be effectively improved, but not without recognizing the humanity and the agency of the people living in them. In Lagos, where public goods are rarely publicly available, slum dwellers are often at the forefront of innovating solutions. After being disconnected from the grid for months because the power company couldn't figure out how to collect bills, one settlement designed a system that collectivized remittances and got everyone cheaper rates into the bargain. Another settlement created a reform program that hires local bad boys as security. They know every trick and every hideout, so now troublemakers are more likely to get caught and reported to police and fewer of the youth end up engaging in criminal activity. Yet another settlement recently completed a flood-safe, eco-friendly communal toilet system. Models like these are being adopted across Lagos.
Les conditions nous faisant définir certains quartiers comme bidonvilles peuvent être améliorées efficacement mais pas sans reconnaître l'humanité et l'organisation des gens qui y vivent. A Lagos, où les biens publics sont peu disponibles publiquement, les habitants des bidonvilles sont souvent à l'avant-garde des solutions innovantes. Après ne pas avoir eu d'électricité durant des mois car la compagnie d'électricité ignorait comment récupérer les factures, un peuplement a conçu un système collectivisant les paiements et a obtenu des tarifs plus faibles pour tous au passage. Un autre peuplement a créé un programme de réforme engageant pour la sécurité des mauvais garçons locaux. Ils connaissent tous les trucs et cachettes, alors plus de fauteurs de troubles seront attrapés et signalés à la police et moins de jeunes prendront part à des activités criminelles. Un autre peuplement a récemment fini un système de toilettes communautaires anti-inondation et écologique. De tels modèles sont adoptés à travers Lagos.
Informal settlements are incorrectly named as the problem. In fact, the real problems are the factors that create them, like the entrenchment of poverty, social exclusion and state failures. When our governments frame slums as threats in order to justify violent land grabs or forced evictions, they're counting on those of us who live in formal housing to tacitly and ignorantly agree with them. Rather, we must remind them that governments exist to serve not only those who build and live in luxury homes, but also those who clean and guard them. Our --
Les peuplements informels sont incorrectement désignés comme le problème. Les vrais problèmes sont les facteurs qui les créent, tels que l'ancrage de la pauvreté, l'exclusion sociale et les échecs étatiques. Quand nos gouvernements en parlent comme de menaces afin de justifier de violentes expropriations ou évictions, ils comptent sur ceux d'entre nous vivant dans un logement formel pour être d'accord avec eux, de façon tacite et ignorante. Nous devons plutôt leur rappeler que les gouvernements doivent servir ceux qui bâtissent et vivent dans des maisons de luxe mais aussi ceux qui les nettoient et les surveillent. Nos --
(Applause)
(Applaudissements)
our realities may differ, but our rights don't.
Nos réalités sont peut-être différentes, mais nos droits sont les mêmes.
The Lagos state government, like far too many on our continent, pays lip service to ideas of inclusion, while acting as though progress can only be achieved by the erasure, exploitation and even elimination of groups it considers expendable. People living with disabilities who hawk or beg on Lagos streets are rounded up, extorted and detained. Women in low-income neighborhoods are picked up and charged with prostitution, regardless of what they actually do for a living. Gay citizens are scapegoated to distract from real political problems. But people, like cities, are resilient, and no amount of legislation or intimidation or violence can fully eliminate any of us. Prostitutes, women and women who work as prostitutes still haven't gone extinct, despite centuries of active suppression. Queer Africans continue to exist, even though queerness is now criminalized in most parts of the continent. And I'm fairly certain that poor people don't generally tend to just disappear because they've been stripped of everything they have.
Le gouvernement d'État de Lagos, comme trop d'autres sur le continent, reconnaissent le mérite des idées d'inclusion, tout en agissant comme si le progrès ne pouvait être réalisé que par l'effacement, l'exploitation et même l'élimination de groupes qu'il considère comme inutiles. Les gens handicapés qui vendent ou font la manche dans les rues de Lagos sont arrêtés, extorqués et détenus. Les femmes des quartiers pauvres sont ramassées et accusées de prostitution, peu importe ce qu'elles font vraiment dans la vie. Les citoyens gays sont pris comme boucs émissaires pour nous distraire des vrais problèmes politiques. Mais les gens, comme les villes, sont résistants et aucune législation, intimidation ou violence ne peut totalement nous éliminer. Les prostituées, les femmes et les femmes travaillant comme prostituées n'ont toujours pas disparu, malgré des siècles de suppression active. Les Africains homosexuels continuent d'exister, même si l'homosexualité est criminalisée sur la plupart du continent. Je suis assez sûre que les pauvres ne disparaissent pas parce qu'ils ont été dépouillés de tout ce qu'ils avaient.
We are all already here, and that answers the question of whether or not we belong.
Nous sommes tous déjà là et cela répond à la question sur le fait que nous ayons notre place ou non.
When those fisherpeople started to sail down the lagoon in search of new homes, it could not have occurred to them that the city that would rise up around them would one day insist that they do not belong in it. I like to believe that my grandfather, in mapping new frontiers for Lagos, was trying to open it up to make room for other people to be welcomed by the city in the same way that he was. On my way here, my grandma called me to remind me how proud she was, how proud [my grandfather] and my mother would have been. I am their dreams come true. But there is no reason why their dreams -- or mine, for that matter -- are allowed to come true while those of others are turned to nightmares. And lest we forget: the minimum requirement for a dream is a safe place to lay your head.
Quand ces pêcheurs ont navigué sur le lagon, cherchant de nouvelles maisons, cela ne leur serait pas venu à l'idée que la ville qui s'élèverait autour d'eux insisterait un jour sur le fait qu'ils n'y ont pas leur place. J'aime croire que mon grand-père, en cartographiant de nouvelles frontières, essayait d'ouvrir Lagos pour faire de la place pour que d'autres y soient accueillis comme il a été accueilli. En route pour venir ici, ma grand-mère m'a appelée pour me rappeler à quel point elle était fière de moi, à quel point mon grand-père et ma mère auraient été fiers. Je suis leur rêve devenu réalité. Mais il n'y a pas de raison que leurs rêves, ou les miens, puissent devenir réalité alors que ceux d'autres sont transformés en cauchemar. N'oublions pas : la condition minimale pour un rêve est un endroit sûr où reposer votre tête.
It is too late now for Basil, but not for Magdalene, not for the hundreds of thousands, the millions still under threat in Lagos or any of our cities. The world does not have to remain blind to the suffering that is created when we deny people's humanity, or even to the incredible potential for growth that exists when we recognize and value all contributions.
Il est trop tard pour Basil, mais pas pour Magdalene, pas pour les centaines de milliers, les millions de personnes encore menacées à Lagos ou dans n'importe quelle ville. Le monde n'a pas à rester aveugle face à la souffrance qui est créée quand nous nions l'humanité des gens ou même l'incroyable potentiel de croissance qui existe quand nous reconnaissons toutes les contributions.
We must hold our governments and ourselves accountable for keeping our shared cities safe for everyone in them, because the only cities worth building -- indeed, the only futures worth dreaming of -- are those that include all of us, no matter who we are or how we make homes for ourselves.
Nous devons nous tenir, nos gouvernements et nous-mêmes, pour responsables du maintien de la sûreté de nos villes pour quiconque s'y trouve, car les seules villes méritant d'être bâties -- les seuls avenirs méritant d'être rêvés -- sont ceux qui nous incluent tous, peu importe qui nous sommes ou comment nous nous bâtissons une maison.
Thank you.
Merci.
(Applause)
(Applaudissements)