I think it'll be a relief to some people and a disappointment to others that I'm not going to talk about vaginas today. I began "The Vagina Monologues" because I was worried about vaginas. I'm very worried today about this notion, this world, this prevailing kind of force of security. I see this word, hear this word, feel this word everywhere. Real security, security checks, security watch, security clearance. Why has all this focus on security made me feel so much more insecure? What does anyone mean when they talk about real security? And why have we, as Americans particularly, become a nation that strives for security above all else? In fact, I think that security is elusive. It's impossible. We all die. We all get old. We all get sick. People leave us. People change us. Nothing is secure. And that's actually the good news.
Je pense que cela sera un soulagement pour certains, une déception pour d'autres: je ne vais pas parler de vagins aujourd'hui. J'ai commencé les Monologues du Vagin parce que je m'inquiétais pour les vagins. Aujourd'hui, je m'inquiète beaucoup de cette notion, de ce monde de cette espèce d'importance prépondérante de la sécurité. Partout je vois ce mot, j'entends ce mot, je ressens ce mot. Réelle sécurité, contrôles de sécurité, dispositif de sécurité, habilitation de sécurité. Pourquoi cette obsession de la sécurité me fait-elle sentir tellement plus en danger? Qu'est-ce que cela veut dire lorsqu'on parle de réelle sécurité? Et pourquoi nous Américains sommes-nous tout spécialement devenus une nation qui place la sécurité au dessus de tout? En fait, je pense que la sécurité est insaisissable, impossible. Nous mourrons tous. Nous vieillissons tous. Nous tombons tous malades. On nous quitte. Les autres nous changent. Rien n'est en sécurité. Et au fond, c'est une bonne nouvelle.
This is, of course, unless your whole life is about being secure. I think that when that is the focus of your life, these are the things that happen. You can't travel very far or venture too far outside a certain circle. You can't allow too many conflicting ideas into your mind at one time, as they might confuse you or challenge you. You can't open yourself to new experiences, new people, new ways of doing things -- they might take you off course. You can't not know who you are, so you cling to hard-matter identity. You become a Christian, Muslim, Jew. You're an Indian, Egyptian, Italian, American. You're a heterosexual or a homosexual, or you never have sex. Or at least, that's what you say when you identify yourself. You become part of an "us." In order to be secure, you defend against "them." You cling to your land because it is your secure place. You must fight anyone who encroaches upon it. You become your nation. You become your religion. You become whatever it is that will freeze you, numb you and protect you from doubt or change. But all this does, actually, is shut down your mind. In reality, it does not really make you safer.
Enfin bien sûr, sauf si toute votre vie a pour objet d'être en sécurité. Je pense que quand c'est là le centre de votre vie, les choses suivantes se produisent. Vous ne pouvez pas voyager très loin, ou vous aventurer trop au-delà de certaines limites. Vous ne pouvez pas vous autoriser à avoir trop d'idées contradictoires en même temps, car elles pourraient vous troubler ou vous remettre en question. Vous ne pouvez pas vous ouvrir à de nouvelles expériences, à de nouvelles personnes, à de nouvelles façons de faire les choses. Elles pourraient vous faire dévier de votre trajectoire. Vous ne pouvez pas ne pas savoir qui vous êtes, alors vous vous accrochez à une identité factuelle. Vous devenez un chrétien, un musulman, un juif. Vous êtes indien, égyptien, italien, américain. Vous êtes hétérosexuel, homosexuel, ou vous êtes asexuel. Ou du moins, c'est ce que vous dites pour vous identifier. Vous devenez une partie d'un "nous". Pour être en sécurité, vous vous défendez contre "eux". Vous vous accrochez à votre pays, car c'est votre endroit sûr. Vous devez combattre tout intrus. Vous devenez votre pays. Vous devenez votre religion. Vous devenez n'importe quoi, du moment que cela vous fige, que vous ne sentez rien et que cela vous protège du doute ou du changement. Mais le vrai résultat de tout cela, c'est que votre esprit se ferme. En réalité, vous n'êtes pas plus en sûreté.
I was in Sri Lanka, for example, three days after the tsunami, and I was standing on the beaches and it was absolutely clear that, in a matter of five minutes, a 30-foot wave could rise up and desecrate a people, a population and lives. All this striving for security, in fact, has made you much more insecure because now you have to watch out all the time. There are people not like you -- people who you now call enemies. You have places you cannot go, thoughts you cannot think, worlds that you can no longer inhabit. And so you spend your days fighting things off, defending your territory and becoming more entrenched in your fundamental thinking. Your days become devoted to protecting yourself. This becomes your mission. That is all you do. Ideas get shorter. They become sound bytes. There are evildoers and saints, criminals and victims.
Par exemple, j'étais au Sri Lanka trois jours après le tsunami, et j'étais sur les plages où il était parfaitement clair qu'en à peine cinq minutes, une vague de 9 mètres de haut pouvait s'élever et profaner un peuple, une population, des vies. Toute cette recherche de la sécurité, en fait, vous a mis bien plus en danger parce que désormais, vous devez être sur vos gardes en permanence. Il y a des gens qui ne sont pas comme vous. Des gens que, désormais, vous appelez des ennemis, des endroits où vous ne pouvez pas aller, des pensées que vous ne pouvez pas avoir, des mondes où vous ne pouvez plus habiter. Et donc vous passez vos jours à combattre des choses, à défendre votre territoire, et à devenir de plus en plus enfermé dans votre pensée fondamentaliste. Vos jours sont consacrés à vous protéger. Cela devient votre mission. C'est tout ce que vous faites. Vos idées sont de plus en plus courtes. Elles deviennent des "petites phrases". Il y a des pécheurs et des saints, des criminels et des victimes.
There are those who, if they're not with us, are against us. It gets easier to hurt people because you do not feel what's inside them. It gets easier to lock them up, force them to be naked, humiliate them, occupy them, invade them and kill them, because they are only obstacles now to your security. In six years, I've had the extraordinary privilege through V-Day, a global movement against [violence against] women, to travel probably to 60 countries, and spend a great deal of time in different portions. I've met women and men all over this planet, who through various circumstances -- war, poverty, racism, multiple forms of violence -- have never known security, or have had their illusion of security forever devastated. I've spent time with women in Afghanistan under the Taliban, who were essentially brutalized and censored. I've been in Bosnian refugee camps. I was with women in Pakistan who have had their faces melted off with acid. I've been with girls all across America who were date-raped, or raped by their best friends when they were drugged one night.
Il y a ceux qui, s'ils ne sont pas avec nous, sont contre nous. Il devient plus facile de blesser les autres, car vous ne sentez pas ce qu'ils sont à l'intérieur. Il est plus facile de les enfermer, de les déshabiller de force, de les humilier, d'occuper leur pays, de les envahir et de les tuer parce qu'ils ne sont plus désormais que des obstacles à votre sécurité. Ces six dernières années, j'ai eu l'incroyable privilège, grâce à V-Day, un mouvement mondial contre les [violences faites aux] femmes, de voyager dans quelque 60 pays, et de passer pas mal de temps dans différentes régions. J'ai rencontré des hommes et des femmes partout sur cette planète, qui, pour des raisons diverses - la guerre, la pauvreté, le racisme, de multiples formes de violence - n'ont jamais connu la sécurité, ou ont eu leur illusion de sécurité brisée à jamais. J'ai passé du temps avec des femmes en Afghanistan, sous le régime taliban, qui étaient profondément brutalisées et reniées. J'ai été dans des camps de réfugiés en Bosnie. J'ai vu des femmes au Pakistan dont le visage avait été brûlé à l'acide. J'ai été avec des jeunes filles de toute l'Amérique qui ont été violées lors d'un rendez-vous romantique ou violées par leurs meilleurs amis une nuit, après avoir été droguées.
One of the amazing things that I've discovered in my travels is that there is this emerging species. I loved when he was talking about this other world that's right next to this world. I've discovered these people, who, in V-Day world, we call Vagina Warriors. These particular people, rather than getting AK-47s, or weapons of mass destruction, or machetes, in the spirit of the warrior, have gone into the center, the heart of pain, of loss. They have grieved it, they have died into it, and allowed and encouraged poison to turn into medicine. They have used the fuel of their pain to begin to redirect that energy towards another mission and another trajectory.
L'une des choses fantastiques que j'ai découvertes dans mes voyages est cette espèce qui est en train d'apparaître. J'ai adoré quand il parlait de cet autre monde qui est tout près de celui-ci. J'ai découvert ces gens, que dans le monde de V-Day, nous appelons des Guerriers du Vagin. Ces gens différents, qui plutôt que de prendre un AK-47 ou des armes de destruction massive ou des machettes, dans l'esprit du guerrier, sont descendus au milieu, au coeur de la douleur, de la perte. Ils y ont fait leur deuil, ils y sont morts, et ils ont accepté et encouragé le poison, pour qu'il devienne remède. Ils ont utilisés leur peine comme force pour rediriger cette énergie vers une autre mission et une autre trajectoire.
These warriors now devote themselves and their lives to making sure what happened to them doesn't happen to anyone else. There are thousands if not millions of them on the planet. I venture there are many in this room. They have a fierceness and a freedom that I believe is the bedrock of a new paradigm. They have broken out of the existing frame of victim and perpetrator. Their own personal security is not their end goal, and because of that, because, rather than worrying about security, because the transformation of suffering is their end goal, I actually believe they are creating real safety and a whole new idea of security. I want to talk about a few of these people that I've met.
Ces guerriers consacrent désormais eux-mêmes et leurs vies à s'assurer que ce qui leur est arrivé n'arrive à personne d'autre. Ils sont des milliers, peut-être des millions sur la planète. Je parie qu'il y en a beaucoup dans cette pièce. Ils ont une combativité et une liberté qui, je crois, sont les fondations d'un nouveau paradigme. Ils se sont échappés du cadre existant de la victime et du bourreau. Leur propre sécurité n'est pas leur but ultime, et grâce à cela, parce que plutôt que de s'inquiéter de la sécurité, parce que la transformation de la souffrance est leur but final, je crois vraiment qu'ils créent une réelle sécurité et une toute nouvelle conception de la sécurité. Je voudrais parler de quelques-unes de ces personnes que j'ai rencontrées.
Tomorrow, I am going to Cairo, and I'm so moved that I will be with women in Cairo who are V-Day women, who are opening the first safe house for battered women in the Middle East. That will happen because women in Cairo made a decision to stand up and put themselves on the line, and talk about the degree of violence that is happening in Egypt, and were willing to be attacked and criticized. And through their work over the last years, this is not only happening that this house is opening, but it's being supported by many factions of the society who never would have supported it. Women in Uganda this year, who put on "The Vagina Monologues" during V-Day, actually evoked the wrath of the government.
Demain je vais au Caire, et je suis si émue de rencontrer ces femmes du Caire qui sont des femmes du V-day, qui sont en train d'ouvrir le premier foyer pour femmes battues au Moyen-Orient. Cela va se produire parce que des femmes au Caire ont pris la décision de résister et de se mettre en danger et de parler du degré de violence qui existe en Égypte et elles ont accepté d'être attaquées et critiquées, et grâce à leur travail ces dernières années, non seulement cette maison va ouvrir, mais en plus elle a le soutien de nombreuses composantes de la société qui sinon ne l'aurait jamais soutenue. Les femmes qui cette année en Ouganda ont monté une production des Monologues du Vagin pour V-day, se sont vraiment attirées la colère du gouvernement.
And, I love this story so much. There was a cabinet meeting and a meeting of the presidents to talk about whether "Vaginas" could come to Uganda. And in this meeting -- it went on for weeks in the press, two weeks where there was huge discussion. The government finally made a decision that "The Vagina Monologues" could not be performed in Uganda. But the amazing news was that because they had stood up, these women, and because they had been willing to risk their security, it began a discussion that not only happened in Uganda, but all of Africa. As a result, this production, which had already sold out, every single person in that 800-seat audience, except for 10 people, made a decision to keep the money. They raised 10,000 dollars on a production that never occurred.
Et - j'adore cette histoire - il y a eu une réunion ministérielle et une rencontre des présidents pour se demander si les Vagins pouvaient venir en Ouganda. Et pendant cette rencontre, reprise pendant des semaines dans la presse, il y a eu un grand débat qui a duré deux semaines. Le gouvernement a finalement décidé que les Monologues du Vagin ne pouvaient pas être joués en Ouganda. Mais la merveilleuse nouvelle est que parce que ces femmes se sont dressées et parce qu'elles ont été prêtes à mettre leur sécurité en danger, cela a lancé un débat qui ne s'est pas limité à l'Ouganda, mais s'est étendu à toute l'Afrique. Le résultat c'est que cette production, dont tous les tickets avaient déjà été vendus, tous les 800 spectateurs, tous sauf dix, ont décidé de laisser l'argent. Elles ont collecté 10 000 dollars avec un spectacle qui n'a jamais eu lieu.
There's a young woman named Carrie Rethlefsen in Minnesota. She's a high school student. She had seen "The Vagina Monologues" and she was really moved. And as a result, she wore an "I heart my vagina" button to her high school in Minnesota.
Il y a une jeune femme qui s'appelle Kerry Ruffleson au Minnesota. Elle est lycéenne. Elle avait vu les Monologues du Vagin et avait été vraiment touchée, et à cause de ça, elle est allée à son lycée au Minnesota avec un badge "J'aime mon vagin".
(Laughter)
(rires)
She was basically threatened to be expelled from school. They told her she couldn't love her vagina in high school, that it was not a legal thing, that it was not a moral thing, that it was not a good thing. So she really struggled with this, what to do, because she was a senior and she was doing well in her school and she was threatened expulsion. So what she did is she got all her friends together -- I believe it was 100, 150 students all wore "I love my vagina" T-shirts, and the boys wore "I love her vagina" T-shirts to school.
En gros, elle s'est retrouvée menacée de renvoi. On lui a dit qu'elle ne pouvait pas aimer son vagin au lycée, que ce n'était pas légal, que ce n'était pas moral, que ce n'était pas bien. Elle a vraiment eu du mal avec tout ça, comment réagir, parce qu'elle était en terminale et qu'elle était bonne élève et qu'on la menaçait d'expulsion, alors ce qu'elle a fait, c'est qu'elle a réuni tous ses amis - je crois qu'il s'agissait de 100, 150 étudiants - tous ont porté à l'école un T-shirt "J'aime mon vagin", les garçons aussi potaient des T-shirts "J'aime son vagin".
(Laughter)
(rires)
Now this seems like a fairly, you know, frivolous, but what happened as a result of that, is that that school now is forming a sex education class. It's beginning to talk about sex, it's beginning to look at why it would be wrong for a young high school girl to talk about her vagina publicly or to say that she loved her vagina publicly.
Bon, ça peut avoir l'air, comment dire, frivole, mais ce qui s'est produit en conséquence de ça, c'est qu'aujourd'hui cette école est en train de mettre en place un cours d'éducation sexuelle, on commence à y parler de sexe, on commence à s'y demander pourquoi ce serait mal pour une lycéenne de parler de son vagin en public ou de dire qu'elle aime son vagin en public.
I know I've talked about Agnes here before, but I want to give you an update on Agnes. I met Agnes three years ago in the Rift Valley. When she was a young girl, she had been mutilated against her will. That mutilation of her clitoris had actually obviously impacted her life and changed it in a way that was devastating. She made a decision not to go and get a razor or a glass shard, but to devote her life to stopping that happening to other girls. For eight years, she walked through the Rift Valley. She had this amazing box that she carried and it had a torso of a woman's body in it, a half a torso, and she would teach people, everywhere she went, what a healthy vagina looked like and what a mutilated vagina looked like. In the years that she walked, she educated parents, mothers, fathers. She saved 1,500 girls from being cut.
Je sais que j'ai déjà parlé d'Agnès ici, mais je veux vous donner des nouvelles récentes d'Agnès. J'ai rencontré Agnès il y a trois ans dans la Vallée du Rift. Quand elle était petite fille, elle a été mutilée de force. Cette mutilation de son clitoris a bien sûr eu des conséquences sur sa vie et l'a changée de façon dévastatrice. Elle a pris la décision de ne pas aller chercher un rasoir ou un éclat de verre, mais de consacrer sa vie à empêcher que cela n'arrive à d'autres petites filles. Huit ans durant, elle a marché à travers la Vallée du Rift. Elle avait cette boîte incroyable qu'elle transportait, et à l'intérieur il y avait un torse de femme, la moitié d'un torse, et elle enseignait, partout où elle allait, ce à quoi ressemblait un vagin en bonne santé et ce à quoi ressemblait un vagin mutilé. Pendant les années de sa marche, elle a éduqué des parents, des mères, des pères ; elle a sauvé 1 500 fillettes de l'excision.
When V-Day met her, we asked her how we could support her and she said, "Well, if you got me a Jeep, I could get around a lot faster." So, we bought her a Jeep. In the year she had the Jeep, she saved 4,500 girls from being cut. So, we said, what else could we do? She said, "If you help me get money, I could open a house." Three years ago, Agnes opened a safe house in Africa to stop mutilation. When she began her mission eight years ago, she was reviled, she was detested, she was completely slandered in her community. I am proud to tell you that six months ago, she was elected the deputy mayor of Narok.
Quand V-day l'a rencontrée, nous lui avons demandé comment nous pouvions la soutenir et elle a dit, "Eh bien, si vous me donniez une Jeep, je pourrais me déplacer bien plus vite." Alors nous lui avons acheté une Jeep. L'année où elle a eu la Jeep, elle a sauvé 4 500 fillettes de l'excision. Donc nous lui avons dit, que pouvons-nous faire de plus? Elle a dit, "si vous m'aidez à obtenir de l'argent, je pourrais ouvrir une maison." Il y a trois ans, Agnès a ouvert une maison d'accueil en Afrique pour en finir avec les mutilations. Quand elle a commencé sa mission, il y a huit ans, elle était vilifiée, elle était détestée, elle était complètement diffamée dans sa communauté. Je suis fière de vous dire qu'il y a six mois, elle a été élue maire adjoint de Narok.
(Applause)
(applaudissements)
I think what I'm trying to say here is that if your end goal is security, and if that's all you're focusing on, what ends up happening is that you create not only more insecurity in other people, but you make yourself far more insecure. Real security is contemplating death, not pretending it doesn't exist. Not running from loss, but entering grief, surrendering to sorrow. Real security is not knowing something, when you don't know it. Real security is hungering for connection rather than power. It cannot be bought or arranged or made with bombs. It is deeper, it is a process, it is acute awareness that we are all utterly inter-bended, and one action by one being in one tiny town has consequences everywhere. Real security is not only being able to tolerate mystery, complexity, ambiguity, but hungering for them and only trusting a situation when they are present.
Je crois que ce que je suis en train d'essayer de dire, c'est que si votre but final est la sécurité, et si c'est tout ce à quoi vous vous consacrez, ce qui finit par arriver, c'est que vous créez non seulement plus d'insécurité pour les autres, mais que vous vous mettez vous-même en plus grand danger. La vraie sécurité, c'est de regarder la mort en face, pas de prétendre qu'elle n'existe pas. Ce n'est pas de fuir les deuils, mais d'entrer dans la peine, de s'abandonner au chagrin. La vraie sécurité, ce n'est pas de savoir quelque chose quand vous ne savez rien. La vraie sécurité, c'est d'avoir faim de contacts, plutôt que de pouvoir. Cela ne s'achète pas, ne s'organise pas, ne s'obtient pas avec des bombes. C'est plus profond, c'est un processus, c'est une conscience aiguë que nous nous appuyons tous les uns sur les autres, et qu'une action d'une personne dans un petit village a des conséquences partout. La vraie sécurité, ce n'est pas seulement être capable de tolérer l'inconnu, la complexité, l'ambiguïté, mais c'est en avoir faim, et ne se sentir en confiance que dans les situations où ils sont présents.
Something happened when I began traveling in V-Day, eight years ago. I got lost. I remember being on a plane going from Kenya to South Africa, and I had no idea where I was. I didn't know where I was going, where I'd come from, and I panicked. I had a total anxiety attack. And then I suddenly realized that it absolutely didn't matter where I was going, or where I had come from because we are all essentially permanently displaced people. All of us are refugees. We come from somewhere and we are hopefully traveling all the time, moving towards a new place. Freedom means I may not be identified as any one group, but that I can visit and find myself in every group. It does not mean that I don't have values or beliefs, but it does mean I am not hardened around them. I do not use them as weapons. In the shared future, it will be just that, shared. The end goal will [be] becoming vulnerable, realizing the place of our connection to one another, rather than becoming secure, in control and alone. Thank you very much.
Il s'est passé quelque chose quand j'ai commencé à voyager pour V-day il y a huit ans. Je me suis perdue. Je me rappelle avoir été dans un avion entre le Kenya et l'Afrique du Sud, et de ne plus savoir d'où j'étais. Je ne savais pas où j'allais, d'où je venais, et j'ai paniqué, j'ai été prise d'une crise d'angoisse. Et puis tout à coup, j'ai réalisé que ça n'avait aucune espèce d'importance où j'allais, d'où je venais, parce qu'au fond nous sommes tous des gens déplacés. Nous sommes tous des réfugiés. Nous venons de quelque part, et on peut espérer que nous voyageons continuellement, que nous allons vers du nouveau. Etre libre veut dire que, sans être identifiée à un groupe donné, je peux rendre visite et me retrouver dans chaque groupe. Cela ne veut pas dire que je n'ai pas de valeurs ou de convictions, mais cela veut dire que je ne me suis pas cristallisée autour de celles-ci. Je ne les utilise pas comme armes. Notre futur commun sera, précisément, commun. Le but final sera de devenir vulnérable, de comprendre l'importance d'être rattachés les uns aux autres, plutôt que d'être en sécurité, en contrôle, et tout seul. Merci beaucoup.
(Applause)
(applaudissements)
Chris Anderson: And how are you doing? Are you exhausted? On a typical day, do you wake up with hope or gloom? Eve Ensler: You know, I think Carl Jung once said that in order to survive the twentieth century, we have to live with two existing thoughts, opposite thoughts, at the same time. And I think part of what I'm learning in this process is that one must allow oneself to feel grief. And I think as long as I keep grieving, and weeping, and then moving on, I'm fine. When I start to pretend that what I'm seeing isn't impacting me, and isn't changing my heart, then I get in trouble. Because when you spend a lot of time going from place to place, country to country, and city to city, the degree to which women, for example, are violated, and the epidemic of it, and the kind of ordinariness of it, is so devastating to one's soul that you have to take the time, or I have to take the time now, to process that.
Comment ça va? Etes-vous épuisée? Lors d'une journée-type, vous réveillez-vous pleine d'espoir, ou déprimée? Vous savez, je crois que Carl Jung a dit que pour survivre au XXe siècle, nous devons vivre avec deux idées existantes et opposées en même temps. Et je crois que ce que j'apprends sur ce chemin, c'est qu'il faut s'autoriser à avoir de la peine. Et je crois que tant que je continue à avoir de la peine, et à pleurer, et ensuite à avancer, ça va. Quand je commence à prétendre que ce que je vois ne me fait pas d'effet, et que cela ne change pas mon coeur, alors j'ai un problème parce que quand vous passez beaucoup de temps à aller d'un endroit à un autre, d'un pays à un autre, d'une ville à une autre, le degré de violence fait, par exemple, aux femmes, et l'épidémie que c'est, et le côté banal de tout ça, c'est tellement ravageur pour votre âme qu'il faut prendre le temps, ou du moins je dois désormais prendre le temps de travailler dessus.
CA: There are a lot of causes out there in the world that have been talked about, you know, poverty, sickness and so on. You spent eight years on this one. Why this one? EE: I think that if you think about women, women are the primary resource of the planet. They give birth, we come from them, they are mothers, they are visionaries, they are the future. If you think that the U.N. now says that one out of three women on the planet will be raped or beaten in their lifetime, we're talking about the desecration of the primary resource of the planet, we're talking about the place where we come from, we're talking about parenting. Imagine that you've been raped and you're bringing up a boy child. How does it impact your ability to work, or envision a future, or thrive, as opposed to just survive? What I believe is if we could figure out how to make women safe and honor women, it would be parallel or equal to honoring life itself.
Il y a de nombreuses causes dans le monde dont on parle, vous savez, la pauvreté, la maladie, etc... vous avez passé huit ans sur celle-là. Pourquoi celle-là? Je pense que, si vous pensez aux femmes, les femmes sont la première ressource de la planète, elles donnent naissance, nous venons d'elles, elles sont mères, elles sont visionnaires, elles sont le futur. Si vous vous dites que les Nations unies disent aujourd'hui qu'une femme sur trois sur la planète sera violée ou battue au cours de sa vie, nous parlons de la profanation de la première ressource de la planète, nous parlons de là d'où nous venons, nous parlons d'éducation parentale. Imaginez que vous avez été violée, et que vous élevez un petit garçon. Comment cela affecte t-il votre capacité à travailler, ou à envisager un avenir, à prospérer au lieu de juste survivre? Ce que je crois, c'est que si nous arrivions à trouver comment protéger et honorer les femmes, ce serait comme, cela équivaudrait à honorer la vie-même.