The minute she said it, the temperature in my classroom dropped. My students are usually laser-focused on me, but they shifted in their seats and looked away.
Le minute où elle l'a prononcé, la température dans ma salle de classe a chuté. D'habitude mes élèves sont totalement concentrés sur moi, mais ils se sont enfoncés dans leur siège et ont détourné le regard
I'm a black woman who teaches the histories of race and US slavery. I'm aware that my social identity is always on display. And my students are vulnerable too, so I'm careful. I try to anticipate what part of my lesson might go wrong. But honestly, I didn't even see this one coming. None of my years of graduate school prepared me for what to do when the N-word entered my classroom.
Je suis une femme noire qui enseigne les histoires de race et de l'esclavage aux États-Unis. Je suis consciente que mon identité sociale est toujours exposée. Et mes élèves sont vulnérables aussi, donc je suis prudente. J’essaie d'anticiper quelle partie de mes cours peut mal tourner. Mais, honnêtement, je n'avais pas vu celle-ci arriver. Aucune de mes années d'études supérieures ne m'avaient préparée à quoi faire quand le « mot N » s'inviterait dans ma classe.
I was in my first year of teaching when the student said the N-word in my class. She was not calling anyone a name. She was bright-eyed and bushy-tailed. She came to class with her readings done, she sat in the front row and she was always on my team. When she said it, she was actually making a point about my lecture, by quoting a line from a 1970s movie, a comedy, that had two racist slurs. One for people of Chinese descent and the other the N-word. As soon as she said it, I held up my hands, said, "Whoa, whoa." But she assured me, "It's a joke from 'Blazing Saddles,'" and then she repeated it.
C'était ma première année d'enseignement quand cet élève l'a prononcé dans ma classe. Elle ne visait personne. Elle était fringante, toute pimpante. Elle est arrivée en classe avec ses devoirs faits, elle s'est assise au premier rang et elle était toujours de mon côté. Quand elle l'a prononcé, elle faisait effectivement une remarque sur mon cours, en citant une phrase d'un film des années 1970, une comédie, qui contenait deux insultes racistes. L'une pour les descendants des Chinois et l'autre, ce mot raciste. Dès qu'elle l'a dit, j'ai levé mes mains en disant « Holà, holà ». Mais elle m'a rassurée, « C'est une blague de 'Blazing Saddles'. » et puis elle l'a répété.
This all happened 10 years ago, and how I handled it haunted me for a long time. It wasn't the first time I thought about the word in an academic setting. I'm a professor of US history, it's in a lot of the documents that I teach. So I had to make a choice. After consulting with someone I trusted, I decided to never say it. Not even to quote it. But instead to use the euphemistic phrase, "the N-word." Even this decision was complicated. I didn't have tenure yet, and I worried that senior colleagues would think that by using the phrase I wasn't a serious scholar. But saying the actual word still felt worse.
Tout ça s'est passé il y a dix ans, et ma manière de le gérer m'a hantée pendant longtemps. Ce n'était pas la première fois que je pensais à ce mot-là dans un milieu universitaire. Je suis professeure d'histoire des États-Unis, ce mot est présent dans beaucoup de documents que j'utilise. Donc j'ai dû faire un choix. Après avoir consulté quelqu'un de confiance, j'ai décidé de ne jamais le dire. Même pas de le citer. Mais plutôt d'utiliser l'euphémisme : le « mot N ». Même cette décision a été compliquée. Je n'étais pas encore titulaire, et je m'inquiétais que mes collègues plus âgés pensent qu'en utilisant cette expression je n'étais pas une chercheuse sérieuse. Mais prononcer le mot lui-même me semblait encore pire.
The incident in my classroom forced me to publicly reckon with the word. The history, the violence, but also -- The history, the violence, but also any time it was hurled at me, spoken casually in front of me, any time it rested on the tip of someone's tongue, it all came flooding up in that moment, right in front of my students. And I had no idea what to do.
L'incident dans ma salle de classe m'a forcé à reconnaître publiquement ce mot. L'histoire, la violence. mais aussi... L'histoire, la violence, mais aussi chaque fois qu'on me l'a adressé, qu'on l'a dit devant moi, chaque fois qu'il est resté au bout de la langue de quelqu'un, tout ça m'est venu comme une avalanche dans ce moment-là, juste devant mes élèves. Et je n'avais aucune idée de quoi faire.
So I've come to call stories like mine points of encounter. A point of encounter describes the moment you came face-to-face with the N-word. If you've even been stumped or provoked by the word, whether as the result of an awkward social situation, an uncomfortable academic conversation, something you heard in pop culture, or if you've been called the slur, or witnessed someone getting called the slur, you have experienced a point of encounter. And depending on who you are and how that moment goes down, you might have a range of responses. Could throw you off a little bit, or it could be incredibly painful and humiliating. I've had lots of these points of encounter in my life, but one thing is true. There's not a lot of space to talk about them.
Donc j'ai décidé d'appeler des histoires comme la mienne « points de rencontre ». Un point de rencontre décrit le moment où vous vous trouvez face à face avec le mot qui commence par N. Si vous êtes déjà resté bloqué ou provoqué par ce mot, le fruit d'une interaction sociale embarrassante, d'une conversation universitaire désagréable, ou quelque chose que vous avez entendu dans la culture pop, ou si on l'a utilisé pour vous insulter, ou si vous avez vu quelqu'un être insulté avec ce mot, vous avez vécu un point de rencontre. Et selon qui vous êtes et comment ce moment se passe, vous pourriez avoir une gamme de réponses. Ça pourrait vous déconcerter un peu, ou ça pourrait être terriblement douloureux et humiliant. J'ai eu plein de de points de rencontre dans ma vie, mais une chose est vraie. Il n'y a pas beaucoup d'espace pour en parler.
That day in my classroom was pretty much like all of those times I had an uninvited run-in with the N-word. I froze. Because the N-word is hard to talk about. Part of the reason the N-word is so hard to talk about, it's usually only discussed in one way, as a figure of speech, we hear this all the time, right? It's just a word. The burning question that cycles through social media is who can and cannot say it. Black intellectual Ta-Nehisi Coates does a groundbreaking job of defending the African American use of the word. On the other hand, Wendy Kaminer, a white freedom of speech advocate, argues that if we don't all just come and say it, we give the word power. And a lot of people feel that way. The Pew Center recently entered the debate. In a survey called "Race in America 2019," researchers asked US adults if they thought is was OK for a white person to say the N-word. Seventy percent of all adults surveyed said "never."
Ce jour-là, dans ma classe, a été comme toutes ces autre fois où j'ai eu une rencontre non sollicitée avec ce mot tabou. Je me suis figée. Parce qu'il est difficile d'en parler. Une partie de la raison pour laquelle il est si difficile d'en parler, c'est qu'on en parle d’habitude que d'une façon, comme une figure de style, on l'entend tout le temps, non ? Ce n'est qu'un mot. La question brûlante qui circule sur les réseaux sociaux c'est qui peut le dire et qui ne le peut pas. L'intellectuel noir Ta-Nehisi Coates fait un travail sans précédent de défense de l'utilisation de ce mot pour les Afro-Américains. D'un autre côté, Wendy Kaminer, une partisane blanche de la liberté d'expression, soutient que si nous ne le disons une fois pour toutes, nous donnons du pouvoir au mot. Et beaucoup de personnes pensent ainsi. Le Pew Center a récemment rejoint le débat. Dans une enquête intitulée « Race in America 2019 », des chercheurs ont demandé à des adultes américains s'ils pensaient que c'était OK pour un Blanc de dire le mot N. 70 % des adultes ont répondu « jamais ».
And these debates are important. But they really obscure something else. They keep us from getting underneath to the real conversation. Which is that the N-word is not just a word. It's not neatly contained in a racist past, a relic of slavery. Fundamentally, the N-word is an idea disguised as a word: that black people are intellectually, biologically and immutably inferior to white people. And -- and I think this is the most important part -- that that inferiority means that the injustice we suffer and inequality we endure is essentially our own fault. So, yes, it is ...
Et ces débats sont importants. Mais en fait ils obscurcissent autre chose. Ils nous empêchent d'entrer dans la vraie conversation. C'est-à-dire que ce terme n'est pas qu'un simple mot. Il n'est pas soigneusement contenu dans un passé raciste, une relique d'esclavage. Fondamentalement, c'est une idée déguisée en mot : que les Noirs sont intellectuellement, biologiquement et immuablement inférieurs aux Blancs. Et -- et je pense que cette partie est la plus importante -- que cette infériorité signifie que l'injustice dont nous souffrons et l'inégalité que nous endurons est essentiellement de notre faute. Donc, oui, c'est ainsi...
Speaking of the word only as racist spew or as an obscenity in hip hop music makes it sounds as if it's a disease located in the American vocal cords that can be snipped right out. It's not, and it can't. And I learned this from talking to my students.
Parler de ce mot comme rien de plus qu'un déversement raciste ou comme une obscénité dans le hip hop donne l'impression que c'est une maladie située dans les cordes vocales qu'on peut tout simplement couper. Ce n'est pas le cas, et on ne peut pas le couper au montage. Et j'ai appris cela en parlant avec mes élèves.
So next time class met, I apologized, and I made an announcement. I would have a new policy. Students would see the word in my PowerPoints, in film, in essays they read, but we would never ever say the word out loud in class. Nobody ever said it again. But they didn't learn much either. Afterwards, what bothered me most was that I didn't even explain to students why, of all the vile, problematic words in American English, why this particular word had its own buffer, the surrogate phrase "the N-word."
Alors la fois suivante où la classe s'est réunie, je me suis excusée, et j'ai fait une annonce. J'aurais une nouvelle règle. Les élèves verraient le mot dans mes PowerPoints, dans des films, dans des essais qu'ils liraient, mais nous ne dirions jamais le mot à haute voix en classe. Personne ne l'a jamais répété. Mais ils n'ont pas beaucoup appris non plus. Après, ce qui m'a le plus dérangée, c'est que je n'ai même pas expliqué aux élèves pourquoi, de tous les mots vils et problématiques en anglais américain, pourquoi ce mot particulier avait son propre tampon, la phrase de substitution : « le mot N ».
Most of my students, many of them born in the late 1990s and afterwards, didn't even know that the phrase "the N-word" is a relatively new invention in American English. When I was growing up, it didn't exist. But in the late 1980s, black college students, writers, intellectuals, more and more started to talk about racist attacks against them. But increasingly, when they told these stories, they stopped using the word. Instead, they reduced it to the initial N and called it "the N-word." They felt that every time the word was uttered it opened up old wounds, so they refused to say it. They knew their listeners would hear the actual word in their heads. That wasn't the point. The point was they didn't want to put the word in their own mouths or into the air. By doing this, they made an entire nation start to second-guess themselves about saying it. This was such a radical move that people are still mad about it. Critics accuse those of us who use the phrase "the N-word," or people who become outraged, you know, just because the word is said, of being overprincipled, politically correct or, as I just read a couple of weeks ago in The New York Times, "insufferably woke." Right?
La plupart de mes élèves, dont beaucoup sont nés à la fin des années 1990 et après, ne savait même pas que cette expression est une invention relativement récente dans l'anglais américain. Pendant mon enfance, ça n'existait pas. Mais à la fin des années 1980, des étudiants, des écrivains, des intellectuels noirs, ont commencé à parler de plus en plus des attaques racistes commises contre eux. Mais, de plus en plus, quand ils racontaient ces histoires, ils n'utilisaient plus ce mot. Au lieu de cela, ils l'ont réduit au N initial et l'ont nommé : « le mot qui commence par N ». Ils sentaient que à chaque fois que ce mot était prononcé il rouvrait des vieilles blessures ce qu'ils se refusaient de faire. Ils savaient que leurs interlocuteurs entendraient le vrai mot dans leur tête. Ce n'était pas la question. La question était qu'ils ne voulaient pas mettre le mot dans leur propre bouche ou dans l'air. En faisant cela, ils ont fait une nation entière commencer à se remettre en question sur l'acte de le dire. Cela a été un coup tellement radical que les gens en sont encore furieux. Des critiques accusent ceux d'entre nous qui utilisent cette expression ou des gens que sont outragés, vous savez, juste parce que ce mot est dit, d'être trop fondés sur des principes, politiquement corrects ou, comme je viens de le lire il y a quelques semaines dans le New York Times, « insupportablement éveillé ». Non ?
So I bought into this a little bit too, which is why the next time I taught the course I proposed a freedom of speech debate. The N-word in academic spaces, for or against? I was certain students would be eager to debate who gets to say it and who doesn't. But they weren't. Instead ... my students started confessing. A white student from New Jersey talked about standing by as a black kid at her school got bullied by this word. She did nothing and years later still carried the guilt. Another from Connecticut talked about the pain of severing a very close relationship with a family member, because that family member refused to stop saying the word.
J'ai adhéré un peu à cette idée aussi, et c'est pour cela que la fois suivante où j'ai donné cours, j'ai proposé un débat sur la liberté d'expression. Le « mot N » aux espaces universitaires, pour ou contre ? J'étais sûre que les élèves seraient impatients pour débattre qui peut le dire et qui ne le peut pas. Mais je m'étais fourvoyée. En fait... Mes élèves ont commencé à confesser. Une élève blanche du New Jersey a parlé de quand elle n'a pas réagi quand un gamin noir de son lycée était harcelé avec ce mot. Elle n'avait rien fait et elle se sentait encore coupable, des années après. Un autre, du Connecticut, a parlé de la douleur de rompre une relation très étroite avec un parent, parce que ce parent a refusé d'arrêter de dire ce mot.
One of the most memorable stories came from a very quiet black student from South Carolina. She didn't understand all the fuss. She said everyone at her school said the word. She wasn't talking about kids calling each other names in the hall. She explained that at her school when teachers and administrators became frustrated with an African American student, they called that student the actual N-word. She said it didn't bother her at all. But then a couple of days later, she came to visit me in my office hours and wept. She thought she was immune. She realized that she wasn't.
L'une des histoires les plus mémorables est venue d'une étudiante noire très calme de la Caroline du Sud. Elle ne comprenait pas toutes ces discussions. Elle a dit que tout le monde à son école disait le mot. Elle ne parlait pas d'enfants qui s’injuriaient dans le couloir. Elle a expliqué qu'à son école, lorsque les enseignants et les administrateurs étaient fâchés contre un étudiant afro-américain, ils appelaient cet étudiant avec le « mot N ». Elle disait que cela ne la dérangeait pas du tout. Mais quelques jours après, elle est venue me rendre visite dans mes heures de bureau et s'est mise à pleurer. Elle avait pensé qu'elle était immunisée. Elle s'est rendue compte qu'elle ne l'était pas.
Over the last 10 years, I have literally heard hundreds of these stories from all kinds of people from all ages. People in their 50s remembering stories from the second grade and when they were six, either calling people the word or being called the word, but carrying that all these years around this word, you know. And as I listened to people talk about their points of encounter, the pattern that emerged for me as a teacher that I found most upsetting is the single most fraught site for these points of encounter is the classroom.
Au cours des 10 dernières années, j'ai entendu littéralement des centaines de ces histoires, de toutes sortes de personnes de tous âges. Des gens de plus de cinquante ans qui se souvenaient des histoires de la deuxième année et de quand ils avaient six ans, soit d'appeler quelqu'un avec ce mot, soit d'être appelé ainsi, mais ils ont porté cela, pendant toutes ces années, vous savez. Et en écoutant les gens parler de leurs points de rencontre, le schéma qui a émergé pour moi, en tant qu'enseignante, que j'ai trouvé le plus dérangeant, c'est que l'endroit le plus difficile pour ces points de rencontre est la salle de classe.
Most US kids are going to meet the N-word in class. One of the most assigned books in US high schools is Mark Twain’s "The Adventures of Huckleberry Finn" in which the word appears over 200 times. And this isn't an indictment of "Huck Finn." The word is in lots of US literature and history. It's all over African American literature. Yet I hear from students that when the word is said during a lesson without discussion and context, it poisons the entire classroom environment. The trust between student and teacher is broken. Even so, many teachers, often with the very best of intentions, still say the N-word in class. They want to show and emphasize the horrors of US racism, so they rely on it for shock value. Invoking it brings into stark relief the ugliness of our nation's past. But they forget the ideas are alive and well in our cultural fabric.
La plupart des enfants américains vont rencontrer le « mot N » en classe. L'un des livres les plus proposés aux élèves aux lycées américains est « Les Aventures de Huckleberry Finn », de Mark Twain, dans lequel le mot apparaît plus de 200 fois. Est cela n'est pas une mise en examen de « Huck Finn ». Le mot est partout dans la littérature et l'histoire américaines. Il est partout dans la littérature afro-américaine. Pourtant, les étudiants me disent que lorsque ce mot est prononcé en classe sans débat ou sans contexte, il empoisonne tout l'environnement de classe. La confiance entre élève et professeur est cassée. Malgré cela, beaucoup de professeurs, souvent avec les meilleures intentions du monde, prononcent toujours le « mot N » en classe. Ils veulent montrer et mettre l'accent sur les horreurs du racisme aux États-Unis, ils comptent donc sur lui pour choquer. L'invoquer, c'est mettre nettement en relief la laideur du passé de notre nation. Mais ils oublient que les idées sont bien vivantes dans notre tissu culturel.
The six-letter word is like a capsule of accumulated hurt. Every time it is said, every time, it releases into the atmosphere the hateful notion that black people are less. My black students tell me that when the word is quoted or spoken in class, they feel like a giant spotlight is shining on them. One of my students told me that his classmates were like bobbleheads, turning to gauge his reaction. A white student told me that in the eighth grade, when they were learning "To Kill a Mockingbird" and reading it out loud in class, the student was stressed out at the idea of having to read the word, which the teacher insisted all students do, that the student ended up spending most of the unit hiding out in the bathroom.
Ce mot de cinq lettres est comme une capsule de douleur accumulée. Chaque fois qu'il est prononcé, chaque fois, il libère dans l'atmosphère la notion odieuse que les Noirs sont moindre. Mes élèves noirs me disent que lorsque le mot est cité ou prononcé en classe, ils ont l'impression qu'un spot géant se tourne vers eux. Un de mes élèves m'a dit que ses collègues de classe étaient devenus comme des figurines, se retournant pour évaluer sa réaction. Un étudiant blanc m'a dit qu'en troisième année, quand ils étaient en train d'apprendre « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur » et le lisaient à haute voix en classe, cet étudiant était si stressé par l'idée de devoir lire le mot, ce que le professeur exigeait des élèves, qu'il a passé la majeure partie du cours caché aux toilettes.
This is serious. Students across the country talk about switching majors and dropping classes because of poor teaching around the N-word. The issue of faculty carelessly speaking the word has reached such a fevered pitch, it's led to protests at Princeton, Emory, The New School, Smith College, where I teach, and Williams College, where just recently students have boycotted the entire English Department over it and other issues. And these were just the cases that make the news. This is a crisis. And while student reaction looks like an attack on freedom of speech, I promise this is an issue of teaching.
C'est sérieux. Les étudiants partout dans le pays parlent de changer de licence et d'abandonner les cours en raison d'un enseignement médiocre autour du « mot N ». La question de son utilisation négligente chez les enseignants a atteint un tel niveau de paroxysme qu'il a conduit à des manifestations à Princeton, Emory, The New School, Smith College, où je travaille, et Williams College, où tout récemment les élèves ont boycotté l'ensemble du département d'anglais à cause de cela et d'autres problèmes. Et il s'agit uniquement de cas qui font l'actualité. C'est une crise. Et bien que la réaction des étudiants ressemble à une attaque contre la liberté d'expression, je promets que c'est une question d'enseignement.
My students are not afraid of materials that have the N-word in it. They want to learn about James Baldwin and William Faulkner and about the civil rights movement. In fact, their stories show that this word is a central feature of their lives as young people in the United States. It's in the music they love. And in the popular culture they emulate, the comedy they watch, it's in TV and movies and memorialized in museums. They hear it in locker rooms, on Instagram, in the hallways at school, in the chat rooms of the video games they play. It is all over the world they navigate. But they don't know how to think about it or even really what the word means.
Mes élèves n'ont pas peur des documents qui contiennent le « mot N ». Ils veulent apprendre sur James Baldwin et William Faulkner et sur le mouvement des droits civiques. En fait, leurs histoires montrent que ce mot est une caractéristique centrale de leur vie comme des jeunes aux États-Unis. C'est dans la musique qu'ils aiment. Et dans la culture populaire qu'ils imitent, la comédie qu'ils regardent, c'est à la télévision et au cinéma et commémoré dans les musées. Ils l'entendent dans les vestiaires, sur Instagram, dans les couloirs de l'école, dans les salons de discussion des jeux vidéo auxquels ils jouent. C'est partout dans le monde dans le lequel ils évoluent. Mais ils ne savent pas quoi en penser ou même ce que signifie vraiment le mot.
I didn't even really understand what the word meant until I did some research. I was astonished to learn that black people first incorporated the N-word into the vocabulary as political protest, not in the 1970s or 1980s but as far back as the 1770s. And I wish I had more time to talk about the long, subversive history of the black use of the N-word. But I will say this: Many times, my students will come up to me and say, "I understand the virulent roots of this word, it's slavery." They are only partially right. This word, which existed before it became a slur, but it becomes a slur at a very distinct moment in US history, and that's as large numbers of black people begin to become free, starting in the North in the 1820s. In other words, this word is fundamentally an assault on black freedom, black mobility, and black aspiration.
Je ne comprenais même pas ce que ça voulait dire avant d'avoir fait des recherches. J'ai été étonnée d'apprendre que les Noirs ont intégré le « mot N » pour la première fois dans le vocabulaire comme protestation politique, non pas dans aux années 1970 ou 1980, mais aussi loin que les années 1770. Et j'aimerais avoir plus de temps pour parler de la longue et subversive histoire de l'utilisation du « mot N » chez les Noirs. Mais je dirais ceci : Plusieurs fois, mes élèves viennent me dire : « Je comprends les racines virulentes de ce mot, c'est l'esclavage ». Ils n'ont que partiellement raison. Ce mot, qui existait avant de devenir une insulte, mais qui devient une insulte à un moment très précis de l'histoire américaine, quand un grand nombre de Noirs ont commencé à obtenir leur liberté, dans le Nord du pays dans les années 1820. Autrement dit, ce mot est surtout une attaque à la liberté, la mobilité et l'aspiration des Noirs.
Even now, nothing so swiftly unleashes an N-word tirade as a black person asserting their rights or going where they please or prospering. Think of the attacks on Colin Kaepernick when he kneeled. Or Barack Obama when he became president. My students want to know this history. But when they ask questions, they're shushed and shamed. By shying away from talking about the N-word, we have turned this word into the ultimate taboo, crafting it into something so tantalizing, that for all US kids, no matter their racial background, part of their coming of age is figuring out how to negotiate this word. We treat conversations about it like sex before sex education. We're squeamish, we silence them. So they learn about it from misinformed friends and in whispers.
Aujourd'hui encore rien ne déclenche aussi rapidement une tirade de « mot N » qu'une personne noire qui fait valoir ses droits, ou qui va où bon lui semble, ou qui prospère. Pensez aux attaques subies par Colin Kaepernick quand il s'est agenouillé ou à Barack Obama quand il est devenu président. Mes élèves veulent connaître cette histoire. Mais quand ils posent des questions, on les fait taire et on les humilie. En évitant de parler du « mot N », nous avons fait de ce mot le tabou ultime, nous l'avons transformé en quelque chose de si captivant, que pour tous les enfants américains, quel que soit leur origine raciale, une partie de leur passage à l'âge adulte consiste à comprendre comment se négocie ce mot. Nous traitons les conversations à ce sujet comme le sexe avant l'éducation sexuelle. Nous sommes prudes, nous les faisons taire. Alors ils en apprennent par des amis mal informés et par des chuchotements.
I wish I could go back to the classroom that day and push through my fear to talk about the fact that something actually happened. Not just to me or to my black students. But to all of us. You know, I think we're all connected by our inability to talk about this word. But what if we explored our points of encounter and did start to talk about it?
J'aimerais pouvoir retourner en classe ce jour-là et dépasser ma peur pour parler du fait que quelque chose s'est réellement passé. Pas seulement pour moi ou pour mes étudiants noirs. Mais pour nous tous. Vous savez, je pense que nous sommes tous liés par notre incapacité à parler de ce mot. Mais, et si nous explorions nos points de rencontre et commencions à en parler ?
Today, I try to create the conditions in my classroom to have open and honest conversations about it. One of those conditions -- not saying the word. We're able to talk about it because it doesn't come into the classroom. Another important condition is I don't make my black students responsible for teaching their classmates about this. That is my job. So I come prepared. I hold the conversation with a tight rein, and I'm armed with knowledge of the history. I always ask students the same question: Why is talking about the N-word hard? Their answers are amazing. They're amazing. More than anything though, I have become deeply acquainted with my own points of encounter, my personal history around this word. Because when the N-word comes to school, or really anywhere, it brings with it all of the complicated history of US racism. The nation's history and my own, right here, right now. There's no avoiding it.
Aujourd'hui, j'essaie de créer les conditions dans ma classe pour avoir des conversations ouvertes et honnêtes à ce sujet. Une de ces conditions - ne pas dire le mot. Nous pouvons en parler parce qu'il ne vient pas en classe. Une autre condition importante, c'est que je ne confie pas à mes étudiants noirs la responsabilité d'enseigner cela à leurs camarades de classe. C'est mon boulot. J'arrive donc préparée. Je tiens la conversation en bride courte et je suis armée d'une connaissance de l'Histoire. Je pose toujours la même question aux élèves : pourquoi est-il difficile de parler du « mot N » ? Leurs réponses sont incroyables. Ils sont incroyables. Mais plus que tout, je me suis profondément familiarisée avec mes propres points de rencontre, mon histoire personnelle autour de ce mot. Parce que lorsque le « mot N » arrive à l'école, ou n'importe où, d'ailleurs, il apporte avec lui toute l'histoire compliquée du racisme américain. L'Histoire de la nation et la mienne, ici, maintenant. C'est impossible de l'éviter.
(Applause)
(Applaudissements)