The history of the country I come from, the Democratic Republic of Congo, has been one of colonizing, disempowering, extracting resources and removing the people's agency over their bodies, their land, their hearts, their destinies. The reason for this unrelenting violence is an ongoing proxy war for the country's vast mineral resources, which are essential to the production of your computers, phones and electronics. In Congo, rape is a weapon of war used by militias to rip apart our communities, resulting in catastrophic sexual violence, political upheaval, displacement and disease.
L'histoire de mon pays d'origine, la République démocratique du Congo, a été marquée par la colonisation, la privation de l’autonomie, l’extraction de ressources et la privation des droits des citoyens sur leur corps, leur terre, leur cœur et leur destin. La raison de cette violence incessante est une guerre par procuration sans fin pour s’approprier les vastes ressources naturelles du pays, essentielles à la production de vos ordinateurs, téléphones et appareils électroniques. Au Congo, le viol est une arme de guerre utilisée par les milices pour déchirer nos communautés, avec pour conséquence des violences sexuelles dévastatrices, des bouleversements politiques, des déplacements et des maladies.
But the Democratic Republic of Congo is also a place of extreme beauty, lush greenery and lakes and forests, where anything can grow if you plant it. Our people are beautiful, fierce, generous. And our women are formidable, creative. When they dance, they change the world.
Mais la République démocratique du Congo est aussi un lieu d’une extrême beauté, avec une végétation luxuriante, des lacs et des forêts, où tout peut pousser si vous le plantez. Notre peuple est beau, intense et généreux. Et nos femmes sont formidables et créatives. Quand elles dansent, elles changent le monde.
After my best friend was murdered in 1998, I devoted my life to the women of Congo and to ending the sexual terrorism that plagues our country. City of Joy, located in Bukavu, in eastern DRC, is a transformational leadership community for women survivors of gender violence that serves 90 women ages 18 to 30 at a time for six months. Women are selected based on their leadership potential by our graduates who are spread across the country, turning pain to power. City of Joy returns women to their bodies, educates them about their rights and develops them as leaders who will one day take back their country.
Après le meurtre de ma meilleure amie en 1998, j'ai consacré ma vie aux femmes du Congo et à la lutte contre le terrorisme sexuel qui sévit dans notre pays. La Cité de la joie, située à Bukavu, dans l’est de la RDC, est une communauté de leadership transformationnelle pour les survivantes de violences sexuelles au service de 90 femmes âgées de 18 à 30 ans qui vivent ensemble pendant six mois. Les femmes sont sélectionnées selon leur potentiel de leadership par nos diplômées qui sont réparties dans tout le pays, transformant ainsi la souffrance en puissance. La Cité de la joie rend aux femmes leur corps, les sensibilise à leurs droits et les cultive pour devenir les leaders qui reprendront un jour leur pays en main.
City of Joy is a physical place, but it is also a desire, a vision, a metaphor for turning pain into power. And by power we mean care, compassion, community. We opened a sanctuary for healing and a revolutionary center in the most impoverished, impossible place in the world, and we were able to succeed at our mission. This may look like a miracle, but it is based on a set of hard-earned guiding principles. I share them with you in the hope that they may inspire you.
La Cité de la joie est un lieu physique, mais c’est aussi un désir, une vision, une métaphore pour transformer la souffrance en puissance. Et par puissance, nous entendons le soin, la compassion, la communauté. Nous avons ouvert un sanctuaire de guérison et un centre révolutionnaire dans l'endroit le plus pauvre et le plus impossible du monde, et nous avons pu mener à bien notre mission. Cela peut sembler miraculeux, mais ça repose en fait sur un ensemble de principes durement acquis. Je les partage avec vous dans l’espoir qu’ils puissent vous inspirer.
[They] are: rebirth is possible. Firstly, we believe that there is no woman, no matter how hurt or violated, broken or lost, who cannot be restored. This, like all the tenets, is a living principle, repeated often at City of Joy. We learn from experience that women who have survived the most violence can, with support and training, become the most visionary leaders. Most women who come to City of Joy have been marginalized due to the stigma surrounding rape.
Ces principes sont les suivants. La renaissance est possible. Tout d’abord, nous pensons qu’aucune femme, qu’elle soit blessée ou violée, brisée ou perdue, ne peut être guérie. Comme tous les principes, il s’agit d’un principe qui se vit, fréquemment répété à la Cité de la joie. L'expérience nous apprend que les femmes qui ont survécu à la pire violence peuvent, avec soutien et formation, devenir les leaders les plus visionnaires. La plupart des femmes qui viennent à la Cité de la joie ont été marginalisées en raison de la stigmatisation liée à leur viol.
Jane Mukunilwa was one of those women, born in the village of Lulingu, one of the worst places for women. In 2005, after being physically and psychologically destroyed through gang rape, Jane underwent nine surgeries to repair the damage that was done to her body. During a long hospital stay, Jane committed herself to helping other women who had undergone similar atrocities, and she imagined creating a shelter of sorts for them. During a chance encounter in May 2007, Jane revealed her deepest desire to V, formerly Eve Ensler, to build a place for women survivors to live together so that they could heal, transform and lead. Jane was in the first class of women at City of Joy, where she proved that change is possible even after one's life has seemingly been destroyed. Jane arrived at City of Joy illiterate, and she graduated able to read and write, with the skills to rebuild her life. She was able to buy a plot of land and build a small house. She joined the staff and is a strong role model for other women living there. When she arrived, her name was Jeanne.
Jane Mukunilwa était l’une de ces femmes, née dans le village de Lulingu, l’un des pires endroits pour les femmes. En 2005, après avoir été démolie physiquement et psychologiquement dans un viol collectif, Jane a subi neuf interventions chirurgicales pour soigner les dommages causés à son corps. Au cours de son long séjour à l’hôpital, elle s’est engagée à aider d’autres femmes qui avaient subi des atrocités similaires, et elle a imaginé créer une sorte de refuge pour elles. Lors d'une rencontre fortuite en mai 2007, Jane a révélé son désir le plus profond à V, anciennement Eve Ensler, de construire un lieu où les survivantes pourraient vivre ensemble afin qu'elles puissent guérir, se transformer et diriger. Jane a fait partie de la première promotion féminine de la Cité de la joie, où elle a prouvé que le changement est possible même lorsque la vie d’une personne a apparemment été détruite. Jane est arrivée analphabète à la Cité de la joie et elle a obtenu son diplôme en sachant lire et écrire, avec les compétences nécessaires pour reconstruire sa vie. Elle a pu acheter un terrain et construire une petite maison. Elle a rejoint le personnel et constitue un modèle pour les autres femmes qui y vivent. À son arrivée, elle s'appelait Jeanne.
(Applause)
(Applaudissements)
When she arrived, her name was Jeanne. She renamed herself Jane. Jane is now a powerful leader and a woman of magnificent energy, vision and life force.
À son arrivée, elle s’appelait Jeanne. Elle s'est rebaptisée Jane. Jane est aujourd’hui un leader influent, une femme dotée d’une énergie, d’une vision et d’une force vitale magnifiques.
Two: grassroots women know what they need.
Deuxièmement : les femmes des communautés savent ce dont elles ont besoin.
(Applause)
(Applaudissements)
They don't need direction or coercion from outside funders. They need resources and respect. The women of Congo envisioned the City of Joy, and they are the ones who run it. Our sisters in the West help by providing resources and sharing our story by being wings at our back. Because of this, we have been able to take risks, become innovators. City of Joy is modeling a new kind of program for survivors, one that has moved from social service to social justice.
Elles n’ont pas besoin de directives ou de contraintes émises par des bailleurs de fonds externes. Elles ont besoin de ressources et de respect. Les femmes du Congo ont imaginé la Cité de la joie et ce sont elles qui la dirigent. Nos sœurs de l’Ouest nous aident en fournissant des ressources, en partageant notre histoire et en devenant nos ailes dans le dos. Grâce à cela, nous avons pu prendre des risques et devenir des innovateurs. La Cité de la joie modélise un nouveau type de programme pour les survivantes, un programme qui est passé du service social à la justice sociale.
Three: women heal in community. Women cannot heal outside community, for as long as the community remains ill or sexist or violent, women remain oppressed and unseen. At City of Joy, women come to understand that their healing is intertwined with their sisters' healing.
Troisièmement : les femmes guérissent en communauté. Les femmes ne peuvent pas guérir en dehors de la communauté, car tant que la communauté reste malade, sexiste ou violente, les femmes restent opprimées et invisibles. À la Cité de la joie, les femmes comprennent que leur guérison est étroitement liée à celle de leurs sœurs.
For example, there is no individual therapy at City of Joy, only group therapy. As your sister changes and grows, you change and grow. As she is able to tell her story, it encourages you to tell yours. As you watch your sister let go of her anger or sadness, you begin to let go of yours. The collective healing of women leads to radical political awakening. It teaches women how to lead by learning how to lead by investing in the whole community.
Par exemple, il n’y a pas de thérapie individuelle à la Cité de la joie, mais uniquement des thérapies de groupe. À mesure que notre sœur change et grandit, on change et grandit soi-même. Quand elle peut raconter son histoire, cela nous encourage à raconter la nôtre. Lorsque l’on regarde une sœur lâcher prise de sa colère ou sa tristesse, on commence à lâcher prise de la sienne. La guérison collective des femmes entraîne une prise de conscience politique radicale. Il enseigne aux femmes comment diriger
Four: the Earth is a central part of our healing. I grew up with a deep love and respect of the Earth, and a vision for connecting the healing of women with the healing of the Earth. City of Joy was able to acquire a 350-hectare farm, which became a centerpiece for our healing. Turning pain to power to planting. There, women learn how to grow cassava, rice, avocados, mangoes, sweet potatoes, beans. They learn to take care of pigs and cows, to harvest nine tilapia ponds and dry fish, to make honey from beehives, to advance their understanding of permaculture. The farm is a living classroom, and we have witnessed the profound healing of survivors as they connect with and cherish the Earth. And the whole farm is stunningly beautiful, which is as healing in itself.
en investissant dans l’ensemble de la communauté. Quatrièmement : la Terre joue un rôle central dans notre guérison. J’ai grandi dans un amour et un respect profonds pour la Terre et dans la vision de faire le lien entre la guérison des femmes et la guérison de la Terre. La Cité de la joie a pu acquérir une ferme de 350 hectares, qui est devenue la pièce maîtresse de notre guérison. Nous transformons la souffrance en puissance en cultivant la terre. Les femmes apprennent à cultiver le manioc, le riz, les avocats, les mangues, les patates douces et les fèves. Elles apprennent à s’occuper des cochons et des vaches, à entretenir neuf étangs à tilapias et à faire sécher le poisson, à fabriquer du miel à partir de ruches, à mieux appréhender la permaculture. La ferme est une salle de classe naturelle. Nous avons été témoins de la profonde guérison des survivantes lorsqu’elles se connectent à la Terre et la chérissent. Toute la ferme est d’une beauté époustouflante, et cela aussi est curatif en soi.
Five: art, theater, music, dance are critical to recovery. At City of Joy, song is the delivery system for many of our principles and ideas. We sing together and dance throughout every day. As we move our bodies, we move the trauma out and bring in new energy. Dance is central to healing, as it allows women to feel the expanse of their power and energy, to begin to love their bodies, to move in community, to express their creativity, to share community tribal dances, and thus remove cultural barriers.
Cinquièmement : l’art, le théâtre, la musique et la danse sont essentiels au rétablissement. À la Cité de la joie, la chanson est le système de diffusion de bon nombre de nos principes et idées. Nous chantons ensemble et nous dansons tous les jours. Lorsque nous bougeons notre corps, nous éliminons le traumatisme et lui apportons une nouvelle énergie. La danse est essentielle à la guérison, car elle permet aux femmes de ressentir l’étendue de leur pouvoir et énergie, de commencer à aimer leur corps, **de se mouvoir en communauté, d’exprimer leur créativité, de partager des danses tribales communautaires et ainsi de supprimer les barrières culturelles.
To date, 1987 women have graduated from the City of Joy.
À ce jour, 1987 femmes ont obtenu leur diplôme de la Cité de la joie.
(Applause)
(Applaudissements)
They are now leaders in their communities, educators, journalists, university students, entrepreneurs of small businesses, initiators of collectives, restaurant owners, farmers and advocates, etc. 1987 women have healed, studied and become empowered, and have joined into a network of love and revolution in over 64 villages and urban areas in the Democratic Republic of Congo. One --
Elles sont devenues leaders dans leurs communautés, éducatrices, journalistes, étudiantes, entrepreneuses, initiatrices de collectifs, restauratrices, agricultrices ou militantes. 1987 femmes ont guéri, étudié et sont devenues autonomes. Elles ont rejoint un réseau d’amour et de révolution dans plus de 64 villages et zones urbaines de la République démocratique du Congo. Mille...
(Applause)
(Applaudissements)
1987 women have released massive trauma and horrific memories. They have danced, sang, learned their rights, performed plays, developed agricultural skills and come to love their bodies. 1987 women have become leaders in their communities and are no longer stigmatized for being raped. 1987 women have turned poison into medicine, isolation into community, shame into self-love, silence into story.
1987 femmes ont laissé derrière elles un traumatisme profond et d'horribles souvenirs. Elles ont dansé, chanté, appris leurs droits, joué des pièces de théâtre, développé des compétences agricoles et appris à aimer leur corps. 1987 femmes sont devenues des leaders au sein de leur communauté et ne sont plus stigmatisées pour avoir été violées. 1987 femmes ont transformé le poison en source de guérison, l’isolement en communauté, la honte en amour de soi, le silence en histoire.
(Applause)
(Applaudissements)
When we named our sanctuary City of Joy, we were told it was inappropriate to use the word "joy" when women had experienced so many horrific rapes and atrocities. But we learned the opposite is true. Joy is possibility, gratitude, and the bodily expression of freedom when pain has turned to power. Joy is the opposite of violence, a far more powerful force in the world. Love ignited in action.
Lorsque nous avons baptisé notre sanctuaire la Cité de la joie, on nous a dit qu’il n’était pas approprié d’utiliser le mot « joie » alors que des femmes avaient subi tant de viols et d’atrocités inhumaines. Mais nous avons appris que c’est le contraire qui est vrai. La joie est possibilité, gratitude et l’expression corporelle de la liberté lorsque la douleur est devenue une force. La joie est le contraire de la violence, une force bien plus puissante au monde. L’amour rayonne dans l’action. Merci.
Thank you.
(Applaudissements)
(Applause)